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André Aubert, membre de Libération-Nord déporté à Dachau
et Berthe Aubert, née Petit son épouse, déportée à Ravensbrück
tous les deux membres du réseau d'évasion Possum

 

André et Berthe Aubert en 1938
(Photographie communiquée par Madame Bocquet-Prioley)

   André AUBERT est né le 30 novembre 1899 à Saint-Just-Sauvage dans le canton d'Anglure (Marne).

   Engagé volontaire en 1917, dès l'achèvement de ses études à l''École normale de Châlons sur Marne, il est au front le jour de ses 18 ans dans le secteur de Noyon (Oise).
   Démobilisé, il épouse en juillet 1920, Berthe PETIT, née à Lepuix-Delle (Territoire de Belfort) le 18 avril 1895.

   Il exerce la fonction d'instituteur à Mareuil-en-Brie dans le canton de Montmort de 1920 à 1927, puis à Monthelon, près d'Épernay, de 1927 à 1930.
   En 1930, il adhère au Parti communiste.
   De 1930 à 1937, il exerce la fonction d'économe au Collège de Vitry-le-François.
   En 1937, auteur d'une pétition contre le principal BARANDON, adressée au ministre du Front populaire, Jean ZAY, il entre en opposition avec l'inspecteur d'académie HELLER, et refuse une mutation à Orléans. Après la visite de l'inspecteur général HÉLICON, suivie d'un bon rapport, il est nommé instituteur à l'École du boulevard des Belges à Reims.

   En septembre 1938, au moment de la crise de Munich, il est mobilisé comme sergent-major sur la Ligne Maginot, pendant une dizaine de jours. Fiché sur son livret militaire comme " PR ", c'est-à-dire " propagandiste révolutionnaire ", il est employé à des travaux antichars entre la Ligne Maginot et la frontière allemande.
   De retour à Reims à l'école du boulevard des Belges en octobre, il participe à la grève générale de novembre 1938, et il est réquisitionné.

   À la fin du mois d'août 1939, il est mobilisé à nouveau sur la Ligne Maginot et nommé adjudant au 61ème Régiment régional de Lorraine.
   Fait prisonnier le 19 juin 1940 près de Montbéliard, il est envoyé au Stalag VII A en Bavière.
   Le 28 juillet 1941, il est libéré conformément aux accords Scapini, comme ancien combattant de 14-18.

   De retour à Reims, il retrouve son poste à l'École du boulevard des Belges où il on lui confie le cours élémentaire 2ème année.
   À la mi-novembre 1941, il reçoit la visite d'un inspecteur des Renseignements généraux de la sous-préfecture de Reims qui lui apporte une convocation, et lui demande de se présenter à la préfecture à Châlons-sur-Marne. Il y est reçu par le préfet René BOUSQUET, qui l'informe qu'il est démissionné d'office à la date du 17 novembre 1941.

   De retour à Reims, il doit quitter l'école du boulevard des Belges et chercher du travail. Un ami, inspecteur aux Établissements économiques le propose pour un poste d'employé de bureau, mais lorsqu'il déclare qu'il a été révoqué par le gouvernement de Vichy, on lui dit qu'on lui écrira, et il ne voit rien venir.
   Au début de l'année 1942, il est embauché par Monsieur BERTHET, directeur de la STEMI, une entreprise rémoise, comme caissier-comptable.
   Responsable à la STEMI du syndicat des métaux de la CGT clandestine, et membre de Libération-Nord, il est contacté le 4 avril 1942 par Léon BORGNIET pour reconstituer dans la clandestinité le Syndicat national des instituteurs.

   Il participe aux réunions du groupe rémois de Libération-Nord et à l'organisation du premier dépôt d'armes à la Bourse du Travail.
   Avec Jean-Marie DOCQ, secrétaire de la Bourse du Travail, il fabrique de faux tickets de rationnement pour les réfractaires du STO, et fonde une Société mutualiste des Ateliers de Reims de la STEMI, qui sert de couverture pour réunir des fonds destinés à la prise en charge des réfractaires du STO.
   Les réfractaires de la région de Reims sont convoyés par Paul SCHLEISS, ajusteur à la STEMI et membre de Libération-Nord, jusqu'aux Cloches des Halles 14, rue Sauval dans le 1er arrondissement de Paris, où un réseau d'évasion de Libération-Nord dirigé par Simon CANTARZOGLOU les prend en charge et les cache dans des fermes en Bretagne et en Normandie.

La plaque commémorative érigée 14, rue Sauval
à l'emplacement des Cloches des Halles

   À l'automne 1943, il est contacté par l'abbé LUNDY et l'abbé DROESCH, vicaires de la paroisse Saint Benoit de Reims, qui lui demandent s'il peut héberger et cacher des membres d'équipages alliés pris en charge par le réseau d'évasion Possum.
    Après en avoir référé au chef départemental de Libération-Nord, Raymond GUYOT, il accepte et cache des pilotes alliés à son domicile 28, rue Victor Rogelet.

   Le 4 janvier 1944, à la suite de la descente de la Gestapo 161, rue Lesage, où le radio du réseau Possum était en train d'émettre, puis de l'arrestation du chef de ce réseau dans un hôtel de Reims fin décembre, Berthe et André AUBERT sont arrêtés par la Gestapo, elle à leur domicile, rue Victor rogelet, lui sur son lieu de travail à la STEMI, .

   André AUBERT est interné à la prison Robespierre de Reims dont il parvient à s'échapper à la faveur du bombardement du 30 mai 1944. Mais parvenu dans la rue par une brèche ouverte dans le mur de la prison, il réalise que son évasion risque d'entraîner de terribles représailles à l'encontre de son épouse dont il est sans nouvelle, et il fait demi-tour.
   Il est transféré à la prison de Châlons-sur-Marne, puis à Compiègne (matricule 40 051).
   Le 18 juin 1944, il est déporté à Dachau, où il reçoit le matricule n° 72 290 et il est affecté au Kommando d'Allach.
   
   Libéré par l'armée américaine le 30 avril 1945, il est rapatrié le 14 mai 1945.

Notes griffonnées par André Aubert lors de la libération de Dachau

30 avril : les premiers Américains en vue du camp
1er mai : la neige
2 mai : le camp s'organise, le ravitaillement s'améliore
3 mai : arrivée du camion de Soissons
4 mai : plusieurs Soissonnais G. Briquet s'échappent
5 mai : de nouveaux camions parisiens, nouveaux départs du camp
           Manifestation en souvenir des camarades russes pendus
6 mai : piqûre contre le typhus

   Rentré à Reims, il apprend que son épouse Berthe est morte en déportation.

   Berthe AUBERT, avait été arrêtée en même temps que lui, internée à la prison de Reims puis transférée au Fort de Romainville et déportée le 18 juin 1944 à Sarrebruck Neue Bremm. Transférée à Ravensbrück où elle a reçu le matricule n° 44 608 , elle y est décédée le 28 janvier 1945.

 Nommé au Collège moderne et technique qui est devenu le Lycée Roosevelt, il y dirige la Section préparatoire à l'École primaire supérieure, et y poursuit sa carrière comme professeur de collège d'enseignement général ( PEGC ) jusqu'à son départ en retraite en 1953.

    André AUBERT a été conseiller municipal de Reims de 1947 à 1953.
    Correspondant marnais du Comité d'histoire de la deuxième guerre mondiale, il a participé dans la Marne aux enquêtes nationales initiées par ce comité, en particulier celle qui a permis de faire le bilan de la déportation en 1966. C'est à partir de ses travaux qu'a pu être dressée la Carte de la souffrance publiée en 1971, qui a été diffusée par le
Centre national de documentation pédagogique dans les collèges et les lycées de la Marne.

   Membre de l'Amicale de Dachau, vice-président départemental de Libération-Nord et vice-président des Combattants volontaires de la Marne, il s'est efforcé de promouvoir le Concours de la Résistance et de la Déportation dans les collèges et les lycées marnais.

   Combattant volontaire de la Résistance et titulaire de nombreuses décorations, André AUBERT a eu l'humilité de n'en porter aucune. Décédé en 1979, il est inhumé au cimetière de l'Est de Reims. Aucune rue de Reims n'honore la mémoire de ce grand résistant.

En 1964, Charles GUGGIARI président départemental de Libération-Nord
a remis la croix de chevalier de la Légion d'honneur à André Aubert

La sépulture d'André Aubert au Cimetière de l'Est à Reims

 

   En 1947, une plaque commémorative a été apposée par la municipalité de Reims, au domicile des époux AUBERT 28, rue Victor Rogelet pour honorer la mémoire de Berthe AUBERT, née PETIT.

   Son nom est inscrit sur le Monument aux martyrs de la résistance et de la déportation de Reims érigé en 1955 sur les Hautes Promenades.

   Depuis 1994, un square de Reims porte son nom, associé à celui de Fernande MONDET, membre comme elle du réseau d'évasion Possum, qui avait mis sa maison de la rue Lesage à disposition du radio de ce réseau.

Le square Berthe Aubert dans le quartier du faubourg de Laon
où résisaient Berthe et André Aubert


   Le nom de Berthe AUBERT est inscrit sur le monument aux morts de R'chésy (Territoire de Belfort), où les époux AUBERT avaient fait construire une maison en 1936-1937.

( Photographies communiquées à Jean-Pierre et Jocelyne Husson par Anne Kleiber )

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