La mémoire des caporaux de Souain à Suippes

Les quatre caporaux de Souain fusillés pour l'exemple à la Ferme de Suippes en 1915

Le combat de Blanche Maupas pour la réhabilitation des caporaux de Souain
et la mémoire du caporal Maupas dans la Manche

Le monument érigé à Suippes en 2007

Une fresque réalisée par le sculpteur Denis Mellinger à partir d'un dessin de Jacqueline Laisné

L'inaugurationn du monument de Suippes le 1er décembre 2007

Les commémorations de 2015

Ressources documentaires pour en savoir plus

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Les quatre caporaux de Souain fusillés pour l'exemple à la Ferme de Suippes en 1915

De gauche à droite
Théophile Maupas, Louis Le Foulon, Louis Girard et Lucien Lechat

   Le 10 mars 1915, les soldats de la 21e compagnie du 336e Régiment d'infanterie, épuisés par les combats et les pertes subies, « complétement abattus et démoralisés », témoigne le caporal MAUPAS lors de son interrogatoire, refusent de sortir des tranchées et de se lancer à nouveau à l'attaque, « ayant en eux-mêmes la vue des cadavres alignés devant eux et l'impossibilité de franchir l'espace les séparant de la tranchée allemande ». De plus, ajoute MAUPAS, « les canons français envoyaient des obus sur la tranchée. Quiconque montait devait être fauché littéralement soit par les nôtres soit par le feu des mitrailleurs allemands ».
   Le général RÉVEILHAC exige des sanctions.
   Le capitaine EQUILBEY reçoit l'ordre de désigner les six plus jeunes caporaux de la compagnie et dix-huit soldats qui sont déférés devant un conseil de guerre.
     Réuni le 16 mars dans une salle de la mairie de Suippes, le conseil de guerre acquitte deux caporaux et les soldats, et condamne à mort  les caporaux Louis GIRARD, Lucien LECHAT, Louis LEFOULON et Théophile MAUPAS, tous les quatre originaires du département de la Manche.
   Ils sont fusillés à la Ferme de Suippes le lendemain 17 mars.
   Dans sa dernière lettre à son épouse Blanche, Théophile MAUPAS écrit : « Je n'ai rien à me reprocher, je n'ai ni volé, ni tué, je n'ai sali ni la réputation ni l'honneur de personne. Je puis marcher la tête haute ». 

  Le combat de Blanche Maupas pour la réhabilitation des caporaux de Souain
et la mémoire de Théophile Maupas dans la Manche

     Dès l'annonce de l'exécution de son mari, Blanche MAUPAS se lance avec beaucoup de courage et d'obstination dans un long combat pour la réhabilitation des caporaux de Souain.
     Elle reçoit l'aide de la sœur du caporal LECHAT, Eulalie et le soutien de la Ligue des droits de l'homme.

     Au Chefresne, commune de la Manche où les époux MAUPAS avaient été nommés instituteurs en 1912, et où Blanche exerçait pendant la 1ère guerre mondiale, les noms de Théophile MAUPAS et de Louis GIRARD ont été gravés dès 1921 sur le monument aux morts de la commune.

Le monument aux morts du Chefresne dans la Manche
ù sont gravés les noms de Louis Girard et de Théophile Maupas

    La campagne menée par Blanche MAUPAS pour réclamer la réhabilitation de son mari et de ses camarades dérange ; elle est déplacée à Montbray, puis à Sartilly.

Carte de visite de Blanche Maupas

   En 1923, institutrice à Sartilly, Blanche MAUPAS a obtenu l'autorisation d'exhumer le corps de son mari enterré à Suippes dans la Marne. Ramenée dans la Manche, la dépouille du caporal MAUPAS a été ré-inhumée dans le cimetière de cette commune le 9 août 1923, au cours d'une cérémonie à laquelle ont participé de nombreux anciens combattants et instituteurs du département de la Manche et de toute la Normandie.

Carte postale diffusée par le Comité de réhabilitation accompagnée de la mention
 « Cher Martyr ! Tu seras vengé ! » et représentant Blanche et Suzanne, la fille de Théophile issue d'un premier mariage, photographiées en août 1923 à Sartilly devant la tombe du caporal Maupas
in Jacqueline LAISNÉFusillés pour l'exemple - Les Caporaux de Souain, le 17 mars 1915,Saint Cyr sur Loire, Alain Sutton, 2002

Le monument aux morts de Sartilly dans la Manche

   Le 20 septembre 1925, dans le cimetière communal de Sartilly, à l'emplacement de la tombe de Théophile MAUPAS, a été inauguré un monument commémoratif aux Caporaux de Souain érigé à la suite d'une souscription. Ce monument a été réalisé par le sculpteur Paul MOREAU-VAUTHIER, le marbrier RIVIÈRE de Villedieu les Poêles et le fondeur JORET.
   Vétéran de Verdun, Paul MOREAU-VAUTHIER est aussi le sculpteur à qui l'on doit la statuaire du Monument à l'Armée noire de Reims et les Bornes du souvenir dites « Bornes du Touring-Club », érigées au cours des années 1920 le long de la ligne de front établie au moment de la contre-offensive victorieuse de l'été 1918.

Le Monument aux caporaux de Souain dans le cimetière communal de Sartilly (Manche)
Sculpture de Paul Moreau-Vauthier

  En 1934, Louis GIRARD, Lucien LECHAT, Louis LEFOULON et Théophile MAUPAS ont été finalement réhabilités par le Tribunal spécial de justice militaire pour la révision des sentences des conseils de guerre :

   Attendu que de l'examen du dossier et de nombreux témoignages recueillis se dégage le sentiment très net que l'ordre donné à la 21e Compagnie du 336e régiment d'infanterie dans la soirée du 10 mars, était irréalisable [...] déclare LECHAT Lucien, GIRARD Louis, LEFOULON Louis et MAUPAS Théophile acquittés de l'accusation retenue contre eux.
  Décharge leur mémoire des condamnations prononcées.

   En 1957, Stanley KUBRICK a réalisé Paths of glory (Les Sentiers de la gloire), qui s'inspire en partie de l'histoire des caporaux de Souain , mais le film n'est sorti en France qu'en 1975 et n'a été diffusé à la télévision qu'en 1982.

Affiche de l'exposition Wake up America ! 1917-1918
créée par l'Historial de la Grande Guerre de Péronne

   Décédée en 1962, Blanche MAUPAS a été inhumée dans le cimetière de Sartilly à côté du Monument aux caporaux de Souain où repose son mari Théophile MAUPAS.

La sépulture de Blanche Maupas dans le cimetière de Sartilly

   En 1970, le nom du caporal MAUPAS a été donnée à la rue conduisant à l'ancienne école de Bréhal, une autre commune de la Manche où il avait été nommé instituteur-stagiaire en 1894 après avoir effectué son service militaire, et où il était en vacances avec Blanche à Saint-Martin de Bréhal, lorsque le 2 août 1914, il avait appris la mobilisation générale.

    À Sartilly, une rue portant le nom de Théophile MAUPAS a été inaugurée le 11 novembre 1994, et la classe où a enseigné Blanche MAUPAS, rue des écoles, a été conservée et intégréee à l'actuelle école maternelle qui porte son nom

À Bréhal (à gauche) et à Sartilly (à droite)

L'école maternelle Blanche Maupas de Sartilly

   En 2002, au Chefresne, commune de la Manche où Blanche et Théophile MAUPAS avaient été nommés instituteurs en 1912, la cour de l'ancienne école devenue mairie a reçu le nom de Place Théophile Maupas.

   Le 16 février 2003, sur cette même place a été inaugurée par le maire Jean-Claude BOSSARD, une plaque commémorative « À nos instituteurs » rendant hommage à Théophile MAUPAS et à son épouse Blanche.

La mémoire de Théophile Maupas au Chefresne dans la Manche

Le monument érigé à Suippes
pour honorer la mémoire des caporaux fusillés en 1915

   En 2004, le conseil municipal de Suippes, commune de la Marne où a siégé en 1915 le conseil de guerre qui a condamné à mort les caporaux Louis GIRARD, Lucien LECHAT, Louis LEFOULON et Théophile MAUPAS, a décidé d'ériger à son tour un monument pour honorer la mémoire des caporaux de Souain.

   Le 1er décembre 2007, à l'occasion de l'inauguration de ce monument, Michel GODIN, maire de Souain, a retracé l'histoire des caporaux de Souain.

Michel Godin, maire de Souain expose « l'affaire des caporaux de Souain »
à la Maison des associations de la Communauté de communes de la région de Suippes
qui accueille le Centre d'interprétation Marne 14-18

Place de l'Hôtel de Ville à Suippes

   Le monument en pierre blanche inauguré en 2007, se dresse face à l'Hôtel de Ville de Suippes où a siégé le 16 mars 1915 le conseil de guerre qui a condamné à mort les caporaux de Souain.
   Il est adossé à l'ancien corps de garde, à l'emplacement d'un appentis détruit en 1992, dans lequel ils ont été incarcérés avant d'être condamnés à mort et fusillés.

Une fresque réalisée par le sculpteur Denis Mellinger
à partir d'un dessin de Jacqueline Laisné

   La réalisation du monument confié au sculpteur meusien Denis MELLINGER dit MELDEN, s'inspire d'un dessin de Jacqueline LAISNÉ
   Institutrice à Sartilly, commune de la Manche où la veuve du caporal MAUPAS, avait elle-même enseigné et qui, avec les anciennes élèves de Blanche MAUPAS, a continué de promouvoir la mémoire des caporaux de Souain.
   Jacqueline LAISNÉ a publié en 1996 Pour l'honneur de Théo et des caporaux de Souain, fusillés le 17 mars 1915, un ouvrage qui a été réédité en 2002 soud le titre Fusillés pour l'exemple : les caporaux de Souain, le 17 mars 1915.

Dessin de Jacqueline Laisné " Fusillés "
in Jacqueline Laisné, Fusillés pour l'exemple - Les Caporaux de Souain, Saint Cyr sur Loire, Alain Sutton, 2002,
et fresque de Denis Mellinger dit Melden

L'inauguration du monument de Suippes le 1er décembre 2007

   L'inauguration du monument le 1er décembre 2007 place de l'Hôtel de Ville à Suippes, était présidée par les élus locaux, André MAUCLERT, maire de Suippes et président de la Communauté de communes de la région de Suippes, Michel GODIN, maire de Souain, Agnès PERSON, maire de Saint-Hilaire le Grand et conseillère générale du canton de Suippes, en présence de Jean-Daniel COUROT, directeur du Service départemental de l'ONAC ( Office national des anciens combattants et victimes de guerre, représentant le préfet de la Marne, et du lieutenant-colonel VINDIOLET, adjoint du Délégué militaire départemental.

    La cérémonie a été marquée par la présence de descendants des caporaux de Souain venus se recueillir avec émotion sur les lieux de leur condamnation et de leur exécution.

André Mauclert, maire de Suippes dévoile le monument
et dépose une gerbe de fleurs au pied du monument, entouré des arrière-petits-enfants de Théophile Maupas

Jean Laurent (à gauche) et Christian Lefoulon (à droite)
petits-fils de Théophile Maupas et de Louis Lefoulon

   Le service départemental de l'ONAC a diffusé à l'occasion de cette inauguration un dépliant réalisé par  Céline BIAVA, déléguée à la Mémoire combattante, qui retrace l'histoire des caporaux de Souain, les circonstances de leur condamnation et de leur exécution, ainsi que le combat pour leur réhabilitation animé en particulier par Blanche MAUPAS.

Le dépliant réalisé par l'ONAC-51

Les commémorations de 2015

   Le 15 mars 2015, la commune du Ferré en Ille-et-Vilaine où est né et où a été inhumé la dépouille du caporal Lucien LECHAT, a rendu hommage aux caporaux de Souain avec la participation des élèves de la commune, en présence de Louis PAUTRET, maire, et de nombreux élus bretons et marnais : messe célébrée par Monseigneur SOUCHU, évêque auxilaire de Rennes, dépôt de gerbes au monument aux morts, puis cérémonie commémorative dans le cimetière communal, et vernissage de l'exposition « De boue et de larmes » à la salle polyvalente du Ferré.

   Les 16 et 17 mars 2015, la commune de Sartilly dans la Manche, où repose la dépouille du caporal Théophile MAUPAS, a rendu à son tour hommage aux caporaux de Souain avec la participation des élèves de la commune : conférence ; projection du film Les sentiers de la gloire, exposition « Maupas, des tranchées à la réhabilitation » ; cérémonies commémoratives au monument aux  morts et au cimetière communal où est érigé le monument « Aux caporaux », en présence de Monsieur RAULT, maire de Sartilly, et de nombreux élus normands et marnais.

Ressources documentaires pour en savoir plus
(Classement alphabétique)

DVD-vidéo

Bibliographie

  André BACH ( général ),
   -  Fusillés pour l'exemple. 1914-1915, Paris, Tallandier, 2003 ;
   - " Les Fusillés français de la Grande Guerre ", 14-18 Le Magazine de la Gande Guerre, n° 29, décembre 2005- janvier 2006.
  Jean GALTIER-BOISSIÈRE, " Les fusillés pour l'exemple ", Le Crapouillot, numéro spécial, août 1934.
  Philippe HUNEMAN et Benjamin DELMOTTE, " Les sentiers de la gloire ", Télédoc - Le petit guide télé pour la classe, Scérén-CNDP, novembre 2007.
 Jacqueline LAISNÉ,
   - Pour l'honneur de Théo et des caporaux de Souain, fusillés le 17 mars 1915, Cherbourg, Éditions Isoète, 1996 ; 
   - Fusillés pour l'exemple - Les Caporaux de Souain, le 17 mars 1915, Saint Cyr sur Loire, Alain Sutton, 2002.
 Blanche MAUPAS, Le combat d'une épouse pour la réhabilitation de son mari, le caporal MAUPAS ( Théo ), l'un des quatre fusillés de Souain exécutés le 17 mars 1915, Paris, Maison coopérative du Livre, 1934 ; réédité en fac-similé avec des illustrations de TARDI sous le titre Le Fusillé, Cherbourg, Éditions Isoète, 2002.
Alain MOREAU et Macha SÉRY, Blanche Maupas. La veuve de tous les fusillés, L'Archipel, 2009.
   Nicolas OFFENSTADT,
   - Les Fusillés de la Grande Guerre et la mémoire collective 1914-1999, Paris, Odile Jacob, 1999 ; Livre de Poche, 2002 ;
   - " Enquête sur les fusillés ", Les collections de L'Histoire, n° 21, octobre-décembre 2003.

Dossiers en ligne

 " À la mémoire des fusillés pour l'exemple ", sur le site de Christian LEFOULON, petit-fils du caporal Louis LEFOULON.
 " Théophile Maupas. Les caporaux de Souain 17 mars 1915 ",  sur le site Clioweb, le blog animé par Daniel LETOUZEY.
 " Affaire des caporaux de Souain ", sur le site de l'encyclopédie en ligne Wikipédia.
 " Les quatre caporaux de Souain fusillés pour l'exemple ", sur le site de Jean MARION dédié aux Monuments aux morts pacifistes.

 15 mars 2015 : Le Ferré rend hommage aux caporaux de Souain, sur le site Clioweb, le blog animé par Daniel LETOUZEY.
 17 mars 2015 : Sartilly rend hommage aux caporaux de Souain, sur le site Clioweb, le blog animé par Daniel LETOUZEY.