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La mémoire du colonel de Gaulle
à Savigny-sur-Ardres
21 mai 1940

Dossier mis en ligne par Jean-Pierre Husson

Savigny-sur-Ardres, un lieu de mémoire méconnu

Le colonel de Gaulle à Savigny-sur-Ardres en mai 1940

L'« appel avant l'Appel » du 21 mai 1940

L'inauguration de la plaque commémorative le 26 mai 1990

18 juin 2009 : l'« Appel de Savigny-sur-Ardres » cité dans le message
du secrétaire d'État à la Défense et aux Anciens combattants

La mémoire de Joseph Tirant de Bury
agent du réseau d'évasion Possum, mort en déportation

 






Savigny-sur-Ardres, un lieu de mémoire méconnu

   Savigny-sur-Ardres, petit village du département de la Marne situé à une vingtaine de kilomètres à l'Ouest de Reims, constitue un lieu de mémoire méconnu, lié au souvenir de la 2e guerre mondiale, avec son « Vieux château », demeure de la famille TIRANT DE BURY dont le portail d'entrée est encadré par deux plaques commémoratives.

Le « Vieux château » demeure de la famille Tirant de Bury
2, rue Perrier de Savigny

Avec l'aimable autorisation de la famille Tirant de Bury


Le colonel de Gaulle à Savigny-sur-Ardres
en mai 1940

   Après avoir livré le 17 mai 1940 à Montcornet, puis au cours des jours suivants dans le secteur de Laon, une bataille de retardement face à l'offensive des blindés allemands du général GUDERIAN, le colonel Charles DE GAULLE qui commandait la 4e Division cuirassée, ayant reçu l'ordre de battre en retraite, a replié sa division à Savigny-sur-Ardres, un petit village de la Marne vidé de ses habitants par l’exode, situé à une vingtaine de kilomètres à l’Ouest de Reims.
   
Il a installé son
poste de commandement dans une ferme à cour fermée, le « Vieux château », située en contre-bas de l'église du village, appartenant à Joseph TIRANT DE BURY.
   La demeure n’était pas comme il le croyait, inoccupée. À la demande pressante de son épouse, Marthe TIRANT DE BURY, qui lui avait demandé d’aller mettre leurs trois enfants à l’abri, Joseph avait quitté Savigny en voiture le 16 mai et s’était jeté sur les routes de l’exode. Marthe, qui avait été infirmière pendant la 1ère guerre mondiale, était restée à Savigny afin de veiller sur la vieille demeure et pouvoir, si nécessaire, y accueillir des soldats blessés et les soigner.
   Le colonel DE GAULLE réquisitionne les bâtiments et consigne Marthe TIRANT DE BURY dans sa chambre, où ses repas lui sont servis, avec interdiction d’en sortir.

L'église de Savigny-sur-Ardres surplombant
le « Vieux-château », demeure de la famille Tirant de Bury ...

 

... où le colonel de Gaulle avait installé le PC de la 4e Division cuirassée

    Au lendemain de la contre-attaque de Montcornet qui, bien qu'ayant militairement échoué, avait démontré l'efficacité de l'arme blindée lorsqu'elle était bien utilisée par les Français, le capitaine SURCHAMP, officier des services de propagande du Grand Quartier général, accompagné de deux techniciens, fut envoyé à Savigny.
   Sa mission était d'enregistrer une allocution du colonel DE GAULLE pour contrer le défaitisme qui envahissait la population, civils et militaires confondus, démoralisée par l'offensive éclair des blindés allemands.
   Enregistrée devant la porte fenêtre du salon, cette allocution fut radiodiffusée le 28 mai et/ou le 2 juin 1940 – selon différentes sources – dans le cadre de l'émission Le Quart d'heure du soldat.

La porte-fenêtre où a été enregistrée l'allocution du colonel de Gaulle

Avec l'aimable autorisation de la famille Tirant de Bury

 
L'« appel avant l'Appel » du 21 mai 1940

  L'allocution du colonel DE GAULLE, enregistrée le 21 mai 1940 à Savigny-sur-Ardres n'avait guère laissé de traces et avait été très vite effacée après la guerre par l'Appel historique du 18 juin 1940.

   Redécouverte et revisitée dans les années 1980, par Jean LACOUTURE en 1984, puis par Anne et Pierre ROUANET en 1985, cette allocution fut alors considérée comme une préfiguration de l'Appel du 18 juin 1940 avec lequel elle présenterait de nombreuses analogies, et fut qualifiée d'« appel du 21 mai 1940  » ou d'« appel avant l'Appel », et même de « primitif du gaullisme radiophonique ».

    Le texte de l'allocution enregistrée le 21 mai 1940 à Savigny-sur-Ardres a été publié en 1985 dans l'ouvrage d'Anne et Pierre ROUANET et peut être consulté sur le site de la Fondation Charles de Gaulle :

L'appel avant l'Appel : Savigny-sur-Ardres, 21 mai 1940

   C’est la guerre mécanique qui a commencé le 10 mai. En l’air et sur la terre, l’engin mécanique – avion ou char – est l’élément principal de la force.
   
L’ennemi a remporté sur nous un avantage initial : pourquoi ? Uniquement parce qu’il a plus tôt et plus complètement que nous mis à profit cette vérité.
   
Ses succès lui viennent de ses divisions blindées et de son aviation de bombardement, pas d’autre chose !
   
Eh bien ! nos succès de demain et notre victoire, oui ! notre Victoire nous viendront un jour de nos divisions cuirassées et de notre aviation d’attaque. Il y a des signes précurseurs de cette victoire mécanique de la France :
   Le Chef qui vous parle a l’honneur de commander une division cuirassée française. Cette division vient de durement combattre ; eh bien ! on peut dire très simplement, très gravement – sans nulle vantardise – que cette division a dominé le champ de bataille de la première à la dernière heure du combat.
   Tous ceux qui y servent, général aussi bien que le plus simple de ses troupiers, ont retiré de cette expérience une confiance absolue dans la puissance d’un tel instrument.
   
C’est cela qu’il nous faut pour vaincre,
   
Grâce à cela, nous avons déjà vaincu sur un point de la ligne.
   
Grâce à cela, un jour nous vaincrons sur toute la ligne.

Texte recueilli par Alex SURCHAMP pour son émission le Quart d'heure du soldat,
cité par Anne et Pierre ROUANET,
L’inquiétude outre-mort du Général de Gaulle,
Paris, Grasset, 1985

   

    La proposition adressée à l'UNESCO en juin 2004 par Emmanuel HOOG, président directeur général de l'Institut national de l'audiovisuel ( INA ), d'inscrire au Programme « Mémoire du Monde » de l'UNESCO, les documents d'archives relatifs à l'Appel du 18 juin 1940, considère dans son Annexe 1 que le texte de l'allocution enregistrée à Savigny le 21 mai « présente de profondes analogies avec l’Appel du 18 juin et en constitue la préfiguration ».


   L'Appel du 18 juin

http://www.crdp-reims.fr/memoire/commemorations/18_juin.htm#appel_du_18_juin

L'appel « À tous les Français » d'août 1940

http://www.crdp-reims.fr/memoire/commemorations/18_juin.htm#appel_aout_1940

   Le même jour, le colonel DE GAULLE écrit depuis Savigny-sur-Ardres une lettre à son épouse Yvonne qui est restée à Colombey-les-deux-Églises avec leurs enfants, et dont il est sans nouvelles. Dans cette lettre, il lui fait part à mots couverts des succès qu'il vient de remporter à Montcornet et s'efforce de la rassurer, tout en lui demandant de se  « replier si cela devenait nécessaire » :    

   21 mai 1940

             Ma chère petite femme chérie,   

   Je t'écris au sortir d'une longue et dure bagarre qui s'est, d'ailleurs, très bien déroulée pour moi. Ma division se forme en combattant et l'on ne me refuse pas les moyens, car si l'atmosphère générale est mauvaise, elle est excellente pour ton mari.   
   Je ne sais où vont les événements. Cependant j'ai aujourd'hui une impression un tantinet meilleure que notre commandement commence à se ressaisir. Cependant sois prête à te replier si cela devenait nécessaire. Je n'ai aucune lettre, cela ne te surprendra pas [...]

Mon adresse : Colonel de Gaulle commandant la Division, Sect. 15.231  

C.

   Le jour de ta fête, j'étais en plein combat et ce combat  – chose rare depuis le début de cette guerre – fut un combat heureux. Dans la pensée je t'ai envoyé mes vœux les plus tendres, Yvonne.

Charles DE GAULLE, Lettres, notes et carnets 1927-1940, Paris, Plon, 1982.


L'inauguration de la plaque commémorative
de Savigny-sur-Ardres le 26 mai 1990

   Le 26 mai 1990, a été célébré à Savigny-sur-Ardres le 50e anniversaire de l'« appel du 21 mai 1940  », en présence du général Alain DE BOISSIEU, Compagnon de la Libération, gendre du général DE GAULLE, et d'Albert TIRANT DE BURY, maire de Savigny-sur-Ardres.
   À cette occasion, une plaque commémorative a été inaugurée à l'entrée de la cour de ferme où a été enregistrée le 21 mai 1940 l'allocution du colonel DE GAULLE.

 

Le comte et la comtesse Tirant de Bury accueillent à Savigny
le général de Boissieu et son épouse Elisabeth, fille du général de Gaulle

L'inauguration de la plaque commémorative

     

Elisabeth de Boissieu dévoile la plaque qui honore le souvenir de son père à Savigny

Avec l'aimable autorisation de Madame Denise Richard-Ognois, amie de la famille Tirant de Bury,
     qui a assisté à l'inauguration aux côtés de son mari Jean Richard, président des Français libres de la Marne
et de sa cousine Jacqueline Thirion-Cavignaux, agent P1 du réseau d'évasion Possum, médaillée de la Résistance

Au-dessus de la plaque commémorative, une croix de Lorraine, symbole de la France libre
          et en-dessous, l'« Appel à tous les Français » du général de Gaulle d'août 1940

Le 21 mai 1940, après quatre jours
de durs combats de la 4ème
Division cuirassée, a été enregistrée dans
cette maison, pour être radiodiffusée, une
déclaration de son chef,
le colonel DE GAULLE
faisant part aux Français de sa confiance
dans une victoire finale.


18 juin 2009 : l'« Appel de Savigny-sur-Ardres » cité dans le message
du secrétaire d'État à la Défense et aux Anciens combattants

    Le 18 juin 2009, à l'occasion de la Journée nationale commémorative de l'appel historique du général de Gaulle à refuser la défaite et à poursuivre le combat contre l'ennemi, le message de Jean-Marie BOCKEL, secrétaire d'État à la Défense et aux anciens combattants, a pour la première fois fait clairement référence au « premier appel radiodiffusé » de Charles de GAULLE, enregistré à Savigny-sur-Ardres le 21 mai 1940, dont il a cité quelques extraits :

   Le 17 mai 1940, à la tête d'une division cuirassée formée en pleine bataille, le colonel de Gaulle démontrait la justesse des vues qu'il avait défendues depuis plusieurs années en obtenant un succès remarquable à Montcornet dans l'Aisne.
   Le 21 mai, à Savigny-sur-Ardres, à la demande de l'État-major, Charles de Gaulle lançait depuis le champ de bataille son premier appel radiodiffusé : « L'ennemi a remporté sur nous un avantage initial... Ses succès lui viennent de ses divisions blindées et de son aviation de bombardement... Nos succès de demain et notre victoire nous viendront un jour de nos divisions cuirassées et de notre aviation d'attaque... Grâce à cela, nous avons déjà vaincu sur un point de la ligne. Grâce à cela, un jour, nous vaincrons sur toute la ligne » [...]


La mémoire de Joseph Tirant de Bury
agent du réseau d'évasion Possum

mort en déportation

Joseph Tirant de Bury

    Une autre plaque commémorative a été érigée au lendemain de la 2e guerre mondiale à gauche du portail de la ferme pour honorer la mémoire de Joseph TIRANT DE BURY, agent P2 du réseau d'évasion Possum, qui a hébergé chez lui plusieurs pilotes alliés. Arrêté le 21 juin 1944, il a été déporté en juillet 1944 au camp de concentration de Neuengamme. Affecté au Kommando de Bremen-Farge, il y est décédé le 17 septembre 1944.

  

Ici demeurait
Joseph TIRANT DE BURY
Résistant
Né le 6 juillet 1892
Mort pour la France
le 17 septembre 1944
au camp de Neuengamme
Allemagne

La plaque à la mémoire de Joseph Tirant de Bury, mort en déportation

   Le nom de Joseph TIRANT DE BURY est gravé avec la mention « déporté » sur le monument aux morts communal érigé à l'ombre de l'église paroissiale.

Le monument aux morts de la commune de Savigny sur Ardres
pavoisé et fleuri par le général de Boissieu le 26 mai 1990

TIRANT DE BURY Joseph, déporté

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