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Le général Eisenhower à Reims

La résidence d'Eisenhower, boulevard Lundy

Eisenhower dans son Quartier général de la rue Jolicœur

Eisenhower fait Citoyen d'honneur de la Ville de Reims le 13 mai 1945

La résidence d'Eisenhower
Boulevard Lundy

17, Boulevard Lundy

Dwight D. Eisenhower
généralissime des Armées alliées
a résidé dans cette maison
du 20 février 1945 au 25 mai 1945
La Ville de Reims
à son illustre citoyen d'honneur
8 mai 1955

   Cette plaque a été inaugurée le 8 mai 1955 à l'occasion du 10ème anniversaire de la victoire alliée, en présence d'un représentant de l'ambassade des États-Unis.
   Le général EISENHOWER, devenu président des États-Unis, invité par la Ville de Reims, avait fait parvenir un télégramme au maire de Reims dans lequel il regrettait de ne pouvoir être présent.

   Je suis très honoré de votre aimable invitation à assister aux cérémonies du 8 mai. Je regrette beaucoup de ne pouvoir être présent, mais je vous adresse mes plus chaleureux sentiments et mes meilleurs voeux pour vous et les citoyens de Reims qui ont une place toute particulière dans ma mémoire.

Dwight D. Eisenhower

   Cette maison, construite en 1911 par l'architecte F. A. D. BOCAGE pour la famille MIGNOT, propriétaire des Comptoirs français, avait été vendue à la famille CLAUZIER après la 1ère guerre mondiale.
   Pendant la 2ème guerre mondiale, elle a été réquisitionnée successivement par les Allemands, puis par les Américains.

   Lorsque le Quartier général du Corps expéditionnaire allié en Europe a quitté la région parisienne pour venir s'installer à Reims, son commandant en chef, le général EISENHOWER, en a fait sa résidence.
   Il y disposait au premier étage, d'un bureau et d'un vaste salon donnant sur le jardin et le temple protestant.

Le bureau

Le grand salon

Le jardin

   Cette maison a été aménagée après la 2e guerre mondiale en copropriété.


Eisenhower dans son Quartier général de Reims
rue Jolicœur

Le collège de la rue Jolicœur où Eisenhower a installé en janvier 1945,
le Quartier général du Corps expéditionnaire en Europe

Le bureau d'Eisenhower et la War Room ou Salle des cartes,
où a été signée la capitulation de l'Allemagne nazie,
avaient été aménagés dans cette aile du bâtiment

Après la signature de la capitulation de l'Allemagne nazie,
Eisenhower brandit les stylos
que vient de lui apporter son aide de camp
dans son bureau du Quartier général allié

Le message dactylographié
adressé aux chefs miltaires alliés
par le général Eisenhower

SHAEF FORWARD
STAFF MESSAGE CONTROL
OUTGOING MESSAGE

URGENT


TO : AGWAR FOR COMBINED CHIEFS OF STAFF

FROM : SHAEF FORWARD, SIGNED EISENHOWER

REF N° : FWD-20798                                  TOO 070325B


The mission of this Allied Force was fulfilled at 0241, local time, May 7th, 1945.

EISENHOWER

ORIGINATOR : SUPREME COMMANDER AUTHENTIFICATION : J. S. MOORE, III
 LT COLONEL

Signé : Dwight Eisenhower

La mission des forces alliées
a été remplie à 2 heures 41, heure locale, le 7 mai 1945.

Dwight Eisenhower

Le discours de la Victoire

« Je pense qu'il est particulièrement symbolique
que la reddition ait été signée au cœur de la France... »

Le général Eisenhower
se prépare à enregistrer le discours de la Victoire
dans la Salle des cartes de son Quartier général,
où vient d'être signée la capitulation de l'Allemagne nazie

  Le 7 mai 1945, à 2 heures 59, le commandant suprême, le général EISENHOWER, accompagné de son adjoint le maréchal de l'Air TEDDER, pénètre dans la War Room, la Salle de guerre ou Salle des cartes du Quartier général allié, pour enregistrer le discours de la victoire destiné aux Actualités cinématographiques.
   Voici la traduction française de ce discours :

   En janvier 1943, le président Roosevelt et le Premier ministre Churchill se sont rencontrés à Casablanca et ont annoncé que la formule de la reddition sans condition serait appliquée aux puissances de l'Axe.
   En Europe cet engagement a été tenu.
   Les forces alliées qui ont envahi l'Europe, le 6 juin 1944 ont, avec leurs vaillants alliés russes, et les armées venues du sud, défait complètement l'Allemagne, sur terre, sur mer et dans les airs.
   Depuis le début, la plus grande partie des forces mises en ligne provenaient de Grande-Bretagne et des États-Unis.
   Des éléments de pratiquement tous les pays opprimés par l'ennemi en Europe ont participé à la lutte.
    Je pense qu'il est particulièrement symbolique que la reddition ait été signée au cœur de la France, ce pays où nous avons débarqué en juin dernier et dont les forces armées et les mouvements de résistance nous ont tant aidés.
   Cette reddition sans condition a été obtenue grâce au travail d'équipe, non seulement de tous les Alliés qui ont participé à la guerre, mais également des différentes armes de terre, de mer et des airs.
   Ma gratitude, qui ne peut être assez grande, va à chacun des cinq millions d'hommes qui ont pris part à la lutte.
   La profonde reconnaissance et la gratitude durable de tous les citoyens libres des Nations Unies leur sont dues ».

Le message manuscrit rédigé
après l'enregistrement du discours de la victoire

La mission des forces alliées
a été remplie à 3 heures, heure locale,
le 7 mai 1945.

 Dwight EISENHOWER


La réception à l'Hôtel de Ville le 12 mai 1945
Le général Eisenhower est fait citoyen d'honneur
de la Ville de Reims

   Le 12 mai 1945, à la veille du second tour des élections municipales et à l'initiative de Pierre SCHNEITER, sous-préfet de Reims, la municipalité de Reims a reçu solennellement le général EISENHOWER à l'Hôtel de Ville, pour lui conférer le titre de citoyen d'honneur de la ville.

   Peu avant 18 heures, le commandant BOUCHEZ, chef de la place, et le sous-préfet, Pierre SCHNEITER, étaient allés chercher le commandant suprême du Corps expéditionnaire allié en Europe à son domicile du Boulevard Lundy, pour l'accompagner jusqu'à la Place de l'Hôtel de Ville.

   EISENHOWER fut accueilli sur le seuil de la mairie par le docteur BILLARD, président de la délégation municipale provisoire mise en place à la Libération, entouré du commissaire de la République, Marcel GRÉGOIRE-GUISELIN, du préfet de la Marne, Raymond JAMMES, d'Henri CHOISNEL, membre de l'Assemblée nationale consultative provisoire et du général PUNICELLI, chef de la 6ème Région militaire, qui l'escortèrent jusquà la Salle des fêtes où avaient été conviés une délégation des représentants du Haut commandement allié conduite par le maréchal de l'Air TEDDER, le commandant de l'Oise Section, le général THRASHER, les membres du Comité départemental et du Comité local de libération, les membres de la délégation municipale et des mouvements de résistance, ainsi que de nombreuse personnalités civiles et religieuses.

   C'est alors que retentirent aux grandes orgues les hymnes nationaux alliés, puis le docteur BILLARD s'adressa au général EISENHOWER en ces termes :

        Mon Général,

   Après avoir fait capituler sans condition, l'armée la plus formidable et la plus orgueilleuse de tous les temps, vous avez dit :
    « Je pense qu'il est particulièrement symbolique que la reddition ait été signée au cœur de la France, ce pays qui a tant souffert, ce pays où nous avons débarqué en juin dernier et dont les forces armées et les mouvements de Résistance nous ont tant aidés ».
   Au nom de la ville de Reims, que j'ai le très grand honneur de représenter aujourd'hui, je vous remercie, mon Général, d'avoir placé le cœur de la France ici.
   Je vous remercie également de l'hommage décerné à l'Armée et à la Résistance françaises, dont les autorités civiles et militaires qui vous reçoivent dans cette ville, sont parmi les représentants les plus authentiques, venus vous apporter leur gratitude ainsi qu'aux hautes autorités militaires Alliées qui vous entourent.
   La Ville de Reims est bien, comme vous l'avez dit, le cœur de la France.
   Non pas parce que c'est la ville de Clovis, des Sacres ou de Jeanne d'Arc, non pas tant par sa cathédrale et son passé chargé de gloire.
   Pour tous les Français, Reims est aujourd'hui le cœur de la France tout simplement parce que c'est votre quartier général, et c'est toujours à Reims que battra le cœur de la France tant que votre fanion flottera sur cette école, désormais historique, où s'est terminée la carrière insensée d'une dictature qui ne rêvait que d'asservir des peuples libres.

    Il est donc légitime que la ville de Reims, la ville martyre de 1914-1918, qui doit déjà tant au peuple américain, vous garde une gratitude toute particulière.
   Elle s'honore aujourd'hui de vous conférer le titre de Citoyen d'honneur.
   Elle ne peut vous donner qu'un faible témoignage de son immense reconnaissance en vous décernant également sa médaille qui sera pour vous le souvenir tangible du lieu, où en tant que commandant suprême des Forces interalliées, vous avez annoncé officiellement à tous les peuples libres la fin des hostilités européennes, dans cette journée qui restera pour le monde entier, associée à votre nom, l'inoubliable journée du 8 mai 1945.

Le docteur Billard s'adresse au général Eisenhower

Le général Eisenhower pendant le discours du docteur Billard

    La réponse du général EISENHOWER fut traduite par le colonel DOSTER :

         Monsieur le Maire,
         Mesdames, Messieurs,

   Je suis profondément sensible à l'honneur que vous voulez bien me conférer aujourd'hui en me décernant le titre de Citoyen d'honneur de la Ville de Reims.
   Ce n'est pas tant à moi personnellement que vous adressez cet hommage, mais plutôt à toutes les troupes qui ont combattu sous mon commandement - les soldats de la France, de l'Empire britannique et de l'Amérique - aussi bien qu'à nos braves camarades de l'Armée Rouge qui ont si vaillement lutté à l'Est.
   C'est donc au nom des troupes sous mon commandement et à titre symbolique, que je suis heureux d'accepter cet insigne honneur.

    Lorsque nous décidâmes de choisir Reims pour y établir notre Quartier Général, nous savions très bien tous les inconvénients, tous les ennuis que la présence d'un grand nombre de troupes occasionnerait à vos habitants.
   Depuis notre arrivée, nous n'avons eu de la part de vos concitoyens qu'un accueil parfaitement amical et toute l'aide qu'il dépendait d'eux de nous accorder.
    Je vous demanderai de bien vouloir vous faire l'interprète auprès de tous vos concitoyens, pour leur exprimer nos remerciements et notre gratitude.
    Je tiens personnellement en cette circonstance à dire toute notre appréciation à tous les Français de la Résistance dont le courageux effort a tant contribué à nos succès depuis le premier jour du débarquement jusqu'au jour de la victoire.
   Mes paroles s'adressent à tous les Français qui ont combattu soit à nos côtés en uniforme, soit clandestinement pour préparer le chemin qui nous mena à la victoire.
   Pour la deuxième fois au cours d'un seul siècle, une Allemagne arrogante et assoiffée de domination, a semé la destruction et la misère sur votre continent.
    À la fin du dernier conflit, nous ne fîmes que conclure un armistice, car il fut bientôt démontré que nous n'avions fait que mettre une fin provisoire aux hostilités et qu'il s'agissait moins d'une paix que d'une cessation temporaire de la lutte.
   Cette fois-ci tout est différent, l'orgueilleux Allemand fut amené à signer la reddition inconditionnelle et à reconnaître formellement sa capitulation totale.
   Cet événement eut lieu dans votre ville, dont l'histoire est déjà si riche d'événements glorieux.
   Que l'acte de capitulation signé par l'ennemi en votre ville vienne s'ajouter à l'histoire glorieuse de la Cité de Reims.

      Le docteur BILLARD présenta ensuite les personnalités au général EISENHOWER puis l'invita à rejoindre la table d'honneur dressée au pied des grandes orgues pour le champagne de l'amitié.

    EISENHOWER, demanda aux officiers de son État-major de lever leur flûte avec lui en l'honneur des Résistants français.

   Le docteur BILLARD invita à son tour les invités français à lever leur flûte en l'honneur des soldats américains venus de si loin pour leur apporter la liberté.

   À gauche : Monseigneur MARMOTTIN, archevêque de Reims, Michel SICRE, président du Comité départemental de libération nationale, le docteur BILLARD, ceint de son écharpe tricolore, président de la délégation municipale provisoire depuis la libération de la ville en août 1944 et le général PUNICELLI, commandant de la 6ème région militaire ; au second plan derrière Michel Sicre et le docteur Billard, Henri CHOISNEL, unique membre marnais siégeant à l'Assemblée consultative provisoire depuis novembre 1944.
   Au centre : 
le général EISENHOWER, commandant suprême du Corps expéditionnaire allié en Europe
   À droite : le préfet de la Marne, Raymond JAMMES, le commissaire régional de la République, Marcel GRÉGOIRE-GUISELIN, et le sous-préfet de Reims, Pierre SCHNEITER, qui porte le deuil de son frère André, chef du mouvement " Ceux de la Résistance " ( CDLR ) de la région de Reims, fusillé par les Allemands à Tournes le 29 août 1944.

   Le général EISENHOWER s'est entretenu avec quelques invités, s'excusant auprès de Monseigneur MARMOTTIN, archevêque de Reims, de ne pouvoir assister le lendemain à la cérémonie consacrée à Jeanne d'Arc, congratulant Michel SICRE, président du Comité départemental de libération et futur maire communiste de Reims, pour le bon travail accompli dans la Résistance, saluant avec émotion Marcel FALALA, tout juste rentré du camp de Dachau.

   Après avoir reçu des mains du docteur BILLARD, la médaille de la Ville de Reims, le général EISENHOWER fut conduit dans le Grand Salon où il signa le Livre d'or de la Ville de Reims.


Le docteur Billard remet la médaille de la Ville de Reims
au général Eisenhower

Le général Eisenhower signe le Livre d'or de la Ville de Reims
dans le Grand Salon

    Après cette cérémonie, le commandant BOUCHEZ et Pierre SCHNEITER ont raccompagné le général à son domicile du Boulevard Lundy où ils se sont entretenus avec lui pendant une demi-heure.
    Selon un rapport des Renseignement généraux daté du 15 mai 1945, au cours de cet entretien, interrompu par un appel téléphonique du Premier ministre britannique, CHURCHILL, le général EISENHOWER se révéla « violemment anti-allemand » en évoquant « les traitements subis par les déportés dans les camps de concentration ». Il déclara que « la Résistance avait rendu de réels services à la cause alliée, moins par son action militaire propre, limitée par le peu d'armes dont elle disposait, que par le climat d'incertitude qu'elle avait créée chez les Allemands », et s'agissant de la France [ on était à la veille du second tour d'élections municipales dont on pouvait sortir une victoire prévisible des partis de gauche, en particulier du parti communiste ], il dit qu'elle « n'avait pas encore retrouvé son équilibre ».

Sources : Archives départementales de la Marne, M 5713 ; Musée de la Reddition de la Ville de Reims L'Union, 9 - 13 - 14 mai 1945 et 7 mai 1955  ; Redditions allemandes 1945, Archives nationales de Washington-Ville de Reims, 1995 ; archives photograhiques de Madame Clauzier ; archives de Michel Sicre ; archives du CRDP de Champagne-Ardenne - rushes de Georges Chantraine ; photographies de Jean-Pierre Husson.

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