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Thème du Concours national de la Résistance et de la Déportation 2022-2023 :
L'école et la résistance : des jours sombres au lendemain de la libération (1940-1945)


CNRD 2022-2023

Document :  23 novembre 1940, saisie d'un tract à la Bibliothèque Carnegie à Reims

 

   La manifestation d'étudiants et de lycéens sur les Champs-Élysées à Paris
le 11 novembre 1940, constitue un des tout premiers actes publics de résistance à l'occupation allemande.

 

(Archives du Comité d'histoire de la 2e guerre mondiale)

« Étudiant de France,
Le 11 novembre est resté pour toi jour de
Fête nationale.
Malgré l'ordre des autorités opprimantes, il sera
Jour de recueillement.
Tu n'assisteras à aucun cours.
Tu iras honorer le Soldat Inconnu 17h30.
Le 11 novembre 1918 fut le jour d'une grande victoire.
Le 11 novembre 1940 sera le signal d'une plus grande encore.
Tous les étudiants sont solidaires pour que
Vive la France.
                                                    Recopie ces lignes et diffuse-les »

   Cette manifestation ne fit pas de morts dans l'immédiat, mais il y eut bien répression. Les archives allemandes font état de 143 arrestations, dont 19 étudiants, 93 lycéens, 31 personnes autres.
   Le 23 novembre 1940, un autre tract sans doute apporté par un étudiant rémois – à cette époque, la Marne faisait partie de l'Académie de Paris – était découvert et saisi dans la salle de lecture de la bibliothèque municipale de Reims, la Bibliothèque Carnegie. Il exaltait la mémoire des « héros tombés le 11 novembre en martyrs de la liberté et de l'indépendance de la France », dénonçait Jérôme CARCOPINO nommé recteur de l'Académie de Paris par Pierre Laval, et le gouvernement de Vichy comme « mouchard », « laquais », « traître à l'Université française et traître à la patrie », exigeait son départ immédiat et la réouverture des facultés fermées à la demande de l'autorité militaire allemande.
   Ce premier acte isolé de résistance à Reims passa totalement inaperçu, mais il montrait cependant que tous les Marnais n'étaient pas d'emblée et inconditionnellement acquis au régime de Vichy et à la collaboration, comme voulait le laisser croire le préfet BOUSQUET dans les rapports qu'il adressait au gouvernement du maréchal Pétain au début de l'occupation allemande.

   Comité d'histoire de la 2e guerre mondiale : R 3602 (3)
Pour une meilleure lisibilité, ce tract découvert à la Bibliothèque Carnegie de Reims le 23 novembre 1940,
a été recomposé mais en respectant la présentation et l'orthographe originelles.

Dossier : Les enseignants marnais dans la Résistance

Dossier réalisé à partir des notices biographiques publiées in
La Résistance dans la Marne, dvd-rom, CRDP de Reims et AERI-Fondation de la Résistance, 2013
Les Fusillés 1940-1944, Les Éditions de l'Atelier, 2015
Le Livre des 9 000 déportés de France à Mittelbau-Dora, Éditions du Cherche-Midi, 2020
Le Maitron-Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier et social, dictionnaire en ligne
Le Maitron-Dictionnaire biographique des fusillés,guillotinés,exécutés, massacrés 1940-1944, dictionnaire en ligne
Notices actualisées en 2022 - Portraits de résistants communiqués par leurs familles - Photos Jean-Pierre et Jocelyne Husson

   « Les enseignants ont tenu une place significative dans les rangs de la résistance marnaise où près de quatre-vingt d’entre eux ont joué un rôle actif.
 Très vite, des instituteurs et des institutrices qui, dans les villages faisaient souvent aussi fonction de secrétaires de mairie, ont été sollicités pour venir en aide à tous ceux qui souhaitaient changer d’identité : prisonniers de guerre évadés, réfractaires au Service du travail obligatoire (STO), juifs, résistants recherchés par la Gestapo.
   Fournir des faux papiers à un clandestin a souvent marqué le début de leur engagement résistant qui s’est manifesté par la suite sous d’autres formes : Raymond Sirot, instituteur à Gueux a rejoint l’équipe BOA (Bureau des opérations aériennes de la France libre) du mouvement Ceux de la Résistance (CDLR) ; Roger Garitan, instituteur à Villers-Allerand, s’est engagé à Libération-Nord ; Christiane Chantrenne, institutrice à Moiremont, est devenue une responsable du BOA ; Yvette Lundy, institutrice à Gionges, a hébergé des clandestins et des aviateurs alliés pris en charge par le réseau d’évasion Possum…
   Parmi les enseignants résistants, beaucoup étaient avant-guerre des militants syndicaux, parfois des adhérents de partis politiques, le plus souvent du Parti socialiste SFIO ou du Parti communiste. Leur participation à la Résistance était pour eux la suite logique de leur engagement. Profondément républicains et attachés à la défense de l’école laïque, ces enseignants étaient opposés au régime de Vichy dont ils étaient l’une des cibles. Certains ont fait l’objet dès 1940 de mesures d’internement administratif comme Sigismond Moszkowski, professeur de mathématiques au lycée Pierre Bayen de Châlons-sur-Marne (Châlons-en-Champagne). Plusieurs autres ont été révoqués comme André Aubert et Pierre Barbier, instituteurs à Reims, ou Alfred Chabaud, professeur à l’École nationale des Arts et métiers de Châlons. Ces enseignants ont souvent rejoint le mouvement Libération-Nord ou le Front national de lutte pour l’indépendance de la France où ils ont assumé des responsabilités. Irénée Dlévaque, professeur de mathématiques au lycée Pierre Bayen de Châlons, a été l’un des initiateurs du groupe châlonnais de Libération-Nord. Léon Borgniet et Robert Duterque étaient membres du Comité départemental de libération nationale (CDLN) de la Marne, le premier au titre du Front national de lutte pour l’indépendance de la France, le second au titre de Libération-Nord.
   Les enseignants ont joué un rôle spécifique dans la presse clandestine. Comme d’autres résistants ils ont diffusé des tracts et journaux clandestins le plus souvent acheminés depuis Paris. Mais, en 1944, ils ont aussi participé à la création de feuilles clandestines marnaises. Robert Duterque a fait partie du comité de rédaction du premier numéro de L’Union « organe officiel du comité départemental de la libération de la Marne », qui a été diffusé à Reims en mai 1944. À la même date, était rédigé le premier numéro de La Marne enseignante, organe du Syndicat national des instituteurs (SNI) qui avait été reconstitué dans la clandestinité par Léon Borgniet, André Aubert, Pierre Barbier, Robert Duterque et Jean Hue. Pierre Barbier de son côté a participé à la création des Fils de Valmy, organe du Front national de lutte pour l’indépendance de la France.
   En 1944, des enseignants ont participé aux combats de la Libération au sein des Forces françaises de l’intérieur (FFI) et des Francs-tireurs et partisans français (FTPF).
   La répression de l’occupant nazi n’a pas épargné les enseignants. Jacques Doré, professeur à Vitry-le-François, a été fusillé en avril 1942. Thérèse Pierre, enseignante marnaise déplacée en Bretagne, est morte sous la torture dans la prison de Rennes en octobre 1943. Sur la quinzaine d’enseignants déportés, dont trois institutrices (Jeanne Barillon, Armande Gandon et Yvette Lundy), trois seulement sont rentrés de déportation (André Aubert, Georges Dahy et Yvette Lundy).
   Dans l’enseignement privé catholique, trois ecclésiastiques ont été déportés pour leur activité résistante : deux frères des Écoles chrétiennes, Jean-Pierre Grill, en religion Frère Arbaud, mort en déportation, qui exerçait au collège du Sacré-Cœur à Reims et Alfred Untereiner, en religion Frère Birin, directeur de l’École Saint-Victor d’Épernay, ainsi que l’abbé Lucien Hess, directeur de la maîtrise de la cathédrale de Reims. Frère Birin et Lucien Hess ont témoigné à leur retour de déportation.   Des plaques commémoratives rendent hommage à la mémoire de ces enseignants résistants décédés lors de la 2e guerre mondiale.
   À Châlons-en-Champagne, dans les locaux de l'Institut national supérieur du professorat et de l’éducation (INSPÉ) une stèle est dédiée aux anciens élèves de l'École normale d'instituteurs et une plaque rappelle le souvenir de deux anciennes élèves de l'École normale d'institutrices, Jeanne Barillon et Thérèse Pierre. Une plaque honore la mémoire de Sigismond Moszkowski dans la salle des professeurs du lycée Pierre Bayen et celle d’Alfred Chabaud à l’intérieur de l’École nationale supérieure d’arts et métiers (ENSAM).
   À L'Épine, dans l'école dont elle était la directrice, une plaque rend hommage à Jeanne Barillon.
   À Lignon, une plaque apposée sur la façade de la mairie honore les instituteurs de ce village du Sud-Est marnais « Morts pour la France », dont Maurice Joussier disparu en déportation.
   À Reims, dans le Square des victimes de la Gestapo, une plaque rend hommage aux « Maîtres de l'école laïque victimes de la barbarie nazie » ; à l'intérieur de l'école Jean Macé, boulevard des Belges, une plaque rappelle le souvenir de Jean Allin , instituteur tué au combat en août 1944, et de Robert Duterque mort en déportation ; au lycée Roosevelt celui d'André Watier professeur dans l'ancien collège moderne et technique et responsable en 1944 du groupe de résistance de Ludes, exécuté par des miliciens fin août 1944.
   Des établissements scolaires portent le nom d'enseignants marnais engagés dans la résistance : École Roger Garitan à Villers-Allerand, collège Yvette Lundy à Aÿ-Champagne, collège Gisèle Probst à Vitry-le-François, collège Raymond Sirot à Gueux. Le nom de Thèrèse Pierre a été donné à une école de Bar-le-Duc dans la Meuse et à un collège de Fougères en Ille-et-Vilaine. Une salle de la cité scolaire de Sézanne porte le nom d'Yvette Lundy.»

                                                                                                                                                                                                               Jean-Pierre et Jocelyne Husson, Mémoires pour demain,
                                                                                    Bulletin de la Délégation de la Marne des Amis de la Fondation pour la Mémoire de de la Déportation-(AFMD-51), numéro 36, octobre 2022.

 

Gaston ALLEMAND (1903-1984)

   Gaston Allemand est né le 14 octobre à Aunac (Charente).
   En 1940, il était économe de l'École normale d'instituteurs de la Gironde à Bordeaux
   Après la suppression des écoles normales par le gouvernement de Vichy, il a été nopmmé économe du Centre régional d’éducation physique de Reims (Marne)à la fin de 1941.
   Il a été homologué FFC (Forces françaises combattantes) au titre du réseau Darius.   Il est décédé le 22 avril 1984 à Reims.


Gaston Allemand

 

Jean ALLIN (1917-1944)



   Né le 9 juin 1917 à Decize (Nièvre), décédé des suites de ses blessures le 30 août 1944 à la Celle-sous-Chantemerle (Marne) ; instituteur ; résistant, CDLR-FFI.

   Jean Allin était le fils d’Albert François Allin, mécanicien mobilisé à l’usine Lepet à Paris au moment de sa naissance, et de Marie Goudard, sans profession. Il avait épousé Yvonne Claudine Amanda Félix le 31 mai 1941 à Reims (Marne). Instituteur à l’école Jean Macé de Reims, Albert Allin a été muté à la rentrée 1941 à La Celle-sous-Chantemerle
   Il a rejoint le groupe CDLR-FFI (Ceux de la Résistance-Forces françaises de l’intérieur) de Sézanne. À la fin du mois d’août 1944, ce groupe, qui constituait le groupe 16 du secteur D des FFI de l'arrondissement d'Épernay commandé par Raymond Moutardier, s'est déployé dans le sud-ouest du département de la Marne en attendant l’arrivée des troupes américaines.
   Aspirant de réserve, Jean Allin avait reçu le commandement de la section FFI de La Celle-sous-Chantemerle avec le grade de lieutenant.
   Le 29 août 1944, la section FFI de La Celle-sous-Chantemerle, commune libérée la veille, a été appelée en renfort par les FFI de Conflans-sur-Seine (Marne) où des soldats allemands isolés avaient été signalés.
   Au retour de cette mission, les FFI de La Celle-sous-Chantemerle ont été surpris par une unité de la Wehrmacht installée pour s'y ravitailler dans le hameau de Charmoy.
   Grièvement blessé et intransportable, Jean Allin est décédé le lendemain 30 août des suites de ses blessures dans le ferme de Charmoy.
   Jean Allin est inhumé à Reims dans le cimetière du Sud.
   Il a obtenu la mention « Mort pour la France » et a été homologué FFI.
   À La-Celle-sous-Chantemerle, le nom de Jean Allin est inscrit sur le monument aux morts communal.
   À Reims, il figure sur la plaque commémorative de l'école Jean Macé, et sous le prénom « Albert » sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » dans le Square des victimes de la Gestapo.
   À Châlons-en-Champagne, son nom est inscrit sur la plaque « 1939-1945 » érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale de filles, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
   À Épernay, il figure sur la liste des « Tués aux combat » du Monument aux martyrs de la Résistance.


Jean Allin

 

André AUBERT (1899-1979) et son épouse Berthe AUBERT née PETIT (1895-1945)

   André Aubert est né le 30 novembre 1899 à Saint-Just-Sauvage (Marne), son épouse Berthe Petit le 18 avril 1895 à Lepuix-Delle dans le Territoire de Belfort.   Engagé volontaire en 1917, dès l'achèvement de ses études à l'École normale d'instituteurs de Châlons-sur-Marne, André Aubert était au front le jour de ses 18 ans dans le secteur de Noyon dans l'Oise. Démobilisé, il a épousé Berthe Petit en juillet 1920.
   Il a été instituteur à Mareuil-en-Brie de 1920 à 1927, puis à Monthelon de 1927 à 1930, époque où il a adhéré au Parti communiste.
   De 1930 à 1937, il a exercé la fonction d'économe au Collège de Vitry-le-François. En 1937, auteur d'une pétition contre le principal Barandon, adressée au ministre du Front populaire Jean Zay, il est entré en opposition avec l'inspecteur d'Académie Heller, et a refusé une mutation à Orléans. Après la visite de l'inspecteur général Hélicon, suivie d'un bon rapport, il a été nommé instituteur à l'École du boulevard des Belges à Reims.
   En septembre 1938, au moment de la crise de Munich, il a été mobilisé comme sergent-major sur la Ligne Maginot pendant une dizaine de jours. Fiché sur son livret militaire comme « PR », c'est-à-dire « propagandiste révolutionnaire », il a été employé à des travaux antichars entre la Ligne Maginot et la frontière allemande. De retour à Reims à l'École du boulevard des Belges en octobre, il a participé à la grève générale de novembre 1938 et il a été réquisitionné.
   À la fin du mois d'août 1939, il a été mobilisé à nouveau sur la Ligne Maginot et nommé adjudant au 61e Régiment régional de Lorraine.
   Fait prisonnier le 19 juin 1940 près de Montbéliard, il a été envoyé au Stalag VII A en Bavière. Le 28 juillet 1941, il a été libéré conformément aux accords Scapini, comme ancien combattant de la 1ère guerre mondiale.
De retour à Reims, il a retrouvé son poste à l'École du boulevard des Belges. À la mi-novembre 1941, il a été convoqué à Châlons-sur-Marne par le préfet René Bousquet qui l'a informé qu'il était démissionné d'office à la date du 17 novembre 1941. Il a dû chercher un nouvel emploi, ce qui s'est avéré difficile après une révocation par le gouvernement de Vichy. Au début de l'année 1942, il a finalement été embauché comme caissier-comptable à la STEMI, une entreprise rémoise. Il y est devenu responsable du syndicat des métaux de la CGT clandestine. Membre de Libération-Nord, il a été contacté le 4 avril 1942 par Léon Borgniet pour reconstituer dans la clandestinité le Syndicat national des instituteurs. Il a participé aux réunions du groupe rémois de Libération-Nord et à l'organisation du premier dépôt d'armes à la Bourse du Travail.
   Avec Jean-Marie Docq, secrétaire de la Bourse du Travail, il a fabriqué de faux tickets de rationnement pour les réfractaires du STO (Service du travail obligatoire), et a fondé la Société mutualiste des Ateliers de Reims de la STEMI, qui a servi de couverture pour réunir des fonds destinés à la prise en charge des réfractaires du STO. Les réfractaires de la région de Reims étaient convoyés par Paul Schleiss, ajusteur à la STEMI et membre de Libération-Nord jusqu'aux Cloches des Halles 14, rue Sauval dans le 1er arrondissement de Paris, où un réseau d'évasion de Libération-Nord dirigé par Simon Cantarzoglou les prenait en charge et les cachait dans des fermes en Bretagne et en Normandie.
   À l'automne 1943, André et Berthe Aubert ont été contactés par l'abbé Lundy et l'abbé Droesch, vicaires de la paroisse Saint-Benoît de Reims, qui leur ont demandé d’héberger des membres d'équipages alliés pris en charge par le réseau d'évasion Possum. Après en avoir référé au chef départemental de Libération-Nord, Raymond Guyot, ils ont accepté et ont caché des aviateurs alliés à leur domicile 28, rue Victor Rogelet à Reims.
   Le 4 janvier 1944, à la suite de la descente de la Gestapo 161, rue Lesage, au domicile de Fernande Mondet où Conrad Lafleur, l'opérateur-radio du réseau Possum, était en train d'émettre, puis de l'arrestation du chef de ce réseau, Dominique Potier, dans un hôtel de Reims fin décembre, Berthe et André Aubert ont été arrêtés par la Gestapo, elle à leur domicile, lui sur son lieu de travail à la STEMI.
   André Aubert a été incarcéré à la prison Robespierre de Reims dont il a réussi à s'échapper à la faveur du bombardement du 30 mai 1944. Mais parvenu dans la rue par une brèche ouverte dans le mur de la prison, il a réalisé que son évasion risquait d'entraîner de terribles représailles à l'encontre de son épouse dont il était sans nouvelles, et il est retourné dans la prison. Transféré à Châlons-sur-Marne, puis à Compiègne (matricule 40 051), André Aubert a été déporté le 18 juin 1944 à Dachau (matricule 72 290), où il a été affecté au Kommando d'Allach. Libéré par l'armée américaine le 30 avril 1945, il a été rapatrié le 14 mai 1945.
   André Aubert a été homologué RIF (Résistance intérieure française) au titre de Libération-Nord et agent P1 du réseau Possum au titre des FFC (Forces françaises combattantes). Il a reçu le titre de Combattant volontaire de la Résistance comme son épouse Berthe avec la mention DIR (Déportés-Internés-Résistants), la Médaille de la Résistance par décret du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946, ainsi que la Médaille de la Liberté (Medal of Freedom)
   Internée à Reims puis à Laon et au Fort de Romainville, Berthe Aubert a été déportée comme résistante le 19 juin 1944 à Sarrebruck Neue Bremm, puis transférée à Ravensbrück (matricule 44 608). Elle y est décédée le 28 janvier 1945, ce qui est confirmé par le Livre des déportées décédées conservé à Ravensbrück et par le JO du 30 avril 1988.
   À Reims, une plaque commémorative a été apposée en 1947 par la municipalité au domicile de Berthe Aubert 28, rue Victor Rogelet et son nom est inscrit sur le Monument aux martyrs de la Résistance et de la Déportation. Depuis 1994, un square porte son nom, associé à celui de Fernande Mondet, elle aussi membre du réseau Possum
   Après son retour de déportation, André Aubert a été nommé au Collège moderne et technique qui est devenu le Lycée Roosevelt. Il y a dirigé la section préparatoire à l'École primaire supérieure et il a poursuivi sa carrière comme professeur de collège d'enseignement général jusqu'à son départ en retraite en 1953. Il a été conseiller municipal de Reims de 1947 à 1953.
   Correspondant marnais du Comité d'histoire de la 2e guerre mondiale, André Aubert a participé dans la Marne aux enquêtes nationales initiées par ce comité. C'est à partir de ses travaux qu’a été dressée la Carte de la souffrance publiée en 1971, diffusée par le CNDP (Centre national de documentation pédagogique) dans les collèges et les lycées de la Marne.
   En 1974, Il a accueilli et formé Jean-Pierre Husson nommé à ses côtés correspondant du Comité d'histoire de la 2e guerre mondiale, puis de l'Institut d'histoire du temps présent (IHTP-CNRS).   
   Membre de l'Amicale de Dachau, vice-président départemental de Libération-Nord et vice-président des Combattants volontaires de la Marne, André Aubert a milité pour la promotion du Concours national de la Résistance et de la Déportation dans les collèges et les lycées marnais.
   Décédé en 1979, André Aubert est inhumé dans le cimetière de l'Est à Reims.



André Aubert, membre de Libération-Nord déporté à Dachau
et Berthe Aubert, née Petit son épouse, déportée à Ravensbrück
tous les deux membres du réseau d'évasion Possum

 

Pierre BARBIER (1913-1945)



   Pierre Barbier est né le 21 décembre 1913 à Trépail (Marne).
   Domicilié à Reims, marié, père d’un garçon né en 1941, Pierre Barbier était instituteur et militant syndical. Révoqué par le gouvernement de Vichy, il a trouvé un emploi dans une agence immobilière.
   En 1943, membre du Comité départemental du Front national de lutte pour l’indépendance de la France, il a participé à la création de plusieurs groupes de Résistance, et il a été l’un des rédacteurs du journal clandestin Les Fils de Valmy.
   Il a hébergé à son domicile des responsables de la résistance, en particulier le commissaire militaire interrégional des Francs-tireurs et partisans français (FTPF), François Grillot, pseudo Germain, présent chez lui le jour de son arrestation par la Gestapo, le 13 juin 1944. Grillot, caché dans la chambre de leur petit garçon, a échappé à l’arrestation grâce au sang froid de Violette Barbier qui a interdit aux policiers d’entrer dans la chambre de leur fils endormi.
   Interné à Châlons-sur-Marne jusqu’au 8 juillet puis à Compiègne, Pierre Barbier a été déporté comme résistant le 15 juillet 1944 à Neuengamme (matricule 37 086).
   Il a été affecté au kommando de Husum-Schwesing où les détenus creusaient des tranchées anti-chars. Il est décédé le 15 février 1945, date retenue par le JO du 17 octobre 2006.
   Pierre Barbier a reçu à titre posthume le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention Déporté-Interné-Résistanr (DIR), et la Médaille de la Résistance par arrêté du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946.
   À Reims, une plaque commémorative a été apposée en 1947 par la municipalité au domicile occupé par son épouse après la guerre 34, rue du Barbâtre, plaque qui a disparu avec cette maison. Une autre plaque refaite à l’identique se trouve aujourd’hui dans le Square des victimes de la Gestapo, où le nom de Pierre Barbier est aussi inscrit sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie ». Il figure également sur la plaque apposée à la Bourse du Travail aujourd’hui Maison régionale des syndicats et sur le Monument aux martyrs de la Résistance et de la Déportation.
   À Châlons-en-Champagne, son nom est inscrit sur la plaque 1939-1945 érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale de filles, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
   À Trépail, il est inscrit sur le monument aux morts.

Jeanne BARILLON née CHARBONNIER (1893-1945) et son époux Émilien BARILLON (1889-1945)



   Jeanne Charbonnier est née le 29 octobre 1893 à Charenton-le-Pont (Seine), son époux, Émilien Barillon, le 19 août 1889 à Sennecay (Cher).
   Formée à l'École normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne entre 1911 et 1914, Jeanne Barillon a été institutrice à Préfontaines dans le Loiret de 1915 à 1917, puis dans la Marne à Sermaize de 1917 à 1931, et enfin à L'Épine où elle était directrice de l'école et secrétaire de mairie. Émilien Barillon était chef de service au Ravitaillement de la Marne à la préfecture de Châlons-sur-Marne.
   En novembre 1942, ils ont rejoint tous les deux le groupe CDLR-BOA (Ceux de la Résistance-Bureau des opérations aériennes de la France libre) animé par Robert Tritant. Émilien a constitué un stock d'essence et de charbon de bois pour gazogènes destiné à la Résistance, et il a diffusé des tracts et des journaux clandestins. Il était aussi chargé des liaisons avec Paris. Jeanne fabriquait des faux-papiers.
   Le 8 septembre 1943, Émilien Barillon a été arrêté à L'Épine, lors des arrestations qui ont démantelé le groupe Tritant. Interné à Compiègne, il a été déporté comme résistant le 22 janvier 1944 à Buchenwald (matricule 42 427). Il a été affecté au kommando d’Ohrdruf où il a été vu pour la dernière fois par ses camarades déportés le 13 mars 1945, date de décès retenue par le JO du 17 octobre 2006.
   Le 17 janvier 1944, Jeanne Barillon a été arrêtée à son tour par la Gestapo à son domicile. Elle a été déportée comme résistante le 19 juin 1944 à Sarrebruck Neue Bremm, et transférée le 7 juillet à Ravensbrück où elle a reçu le matricule 44 609. Elle y est décédée le 6 février 1945, selon le registre des déportées décédées à Ravensbrück, alors que le JO du 30 juin 1987 indique la date du 6 juillet 1945.
    Jeanne et Émilien Barillon ont reçu à titre posthume le titre de Combattants volontaires de la Résistance, mention DIR (Déportés-Internés-Résistants), et la Médaille de la Résistance par arrêté du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946 pour Émilien, du 6 novembre 1962 publié au JO du 13 novembre 1962 pour Jeanne.
   À L'Épine, les noms de Jeanne Charbonnier et d'Émilien Barillon figurent sur le monument aux morts. La place d'un nouveau lotissement porte le nom de Jeanne Barillon dont le souvenir est rappelé sur une plaque apposée dans une salle de classe de l'école.
   À Châlons-en-Champagne, une plaque honorant la mémoire de deux anciennes élèves, Jeanne Barillon-Charbonnier et Thérèse Pierre, avait été apposée en 1946 à la demande de l’Amicale des anciennes élèves à l’intérieur de l’École normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne. Cette plaque, déposée en 1979 lors de travaux et un temps oubliée dans une réserve, a été remise en place en mai 2007 dans ces locaux devenus Institut de formation des maîtres (IUFM), puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ). La date de décès de Jeanne Barillon indiquée sur cette plaque correspond à la date retenue par le JO du 30 juin 1987.
   À Reims, le nom de Mme Barillon-Charbonnier est inscrit sur la plaque dédiée « Aux maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » apposée dans le Square des victimes de la Gestapo.

 

Léon BORGNIET dit Léo (1913-1990), pseudonyme dans la Résistance : Merlin

   Léo Borgniet est né le 14 février 1913 à Haybes (Ardennes). Son père, ardoisier, est mort au front à Verdun en 1916. En août 1933, il a épousé Raymonde Garnier. Le couple, qui avait deux filles, était domicilié à Reims.
   Instituteur à Montmirail puis à Reims, il était avant-guerre membre du bureau du Syndicat national des instituteurs (SNI) et de la section interdépartementale CGTU (Confédération générale du travail unitaire) de l’enseignement. Il animait également le Club sportif du travail affilié à la FSGT (Fédération sportive et gymnique du travail), créé à la Bourse du Travail de Reims. Après l’échec du Front populaire, il a participé aux grèves de 1938.
   Mobilisé en 1939, il a été fait prisonnier en 1940 et s’est évadé aussitôt. De retour à Reims, il a repris contact avec ses camarades instituteurs.
   En 1942, Léo Borgniet et son épouse Raymonde ont hébergé et caché à leur domicile deux juifs rémois, Charles Zins et son fils Bernard qui sont passés ensuite en zone Sud.
   Au début de l’année 1943, en liaison avec les responsables de la CGT clandestine (Confédération générale du travail réunifiée dans la Résistance) et de Libération-Nord, Léo Borgniet a participé à la reconstitution dans la clandestinité du Syndicat national des instituteurs avec l’aide de  Pierre Barbier, Robert Duterque et Jean Hue, et il en est devenu le principal animateur.
   De mai à novembre 1943, il a exercé la fonction de chef de groupe au sein du mouvement Libération-Nord.
   En novembre 1943, contacté par Michel Sicre, responsable de ce mouvement dans la Marne, il a rejoint le Front national de lutte pour l'indépendance de la France et il a adhéré au Parti communiste.
   Il a apporté son aide à plusieurs familles qui acceptaient d’héberger des membres d’équipages alliés pris en charge par le réseau d’évasion Possum.
   Avec Amiot, Paul Treuil et Marcel Franquet, il a entrepris la rédaction et la diffusion du premier numéro de La Marne enseignante, daté de mai 1944.
   En juin 1944, il est devenu sous le pseudonyme de Merlin, le responsable de l'arrondissement de Reims du Front national. Lieutenant FTPF (Francs-tireurs et partisans français), il a assuré le recrutement et l’organisation de la 3e Compagnie FTP de Reims, et il a participé aux combats de la libération de la ville.
   Membre du Comité départemental de libération nationale (CDLN) de la Marne au titre du Front national, il en a assuré le secrétariat et a présidé deux commissions : celle des municipalités et celle des déportés, prisonniers, internés et réfugiés.
   Secrétaire départemental du Syndicat national des instituteurs, il a participé à la commission exécutive de l’Union départementale CGT et a siègé au conseil de gérance du journal L’Union dont il était secrétaire général au titre du Front national.
   Élu conseiller général communiste dans le 3e canton de Reims en septembre 1945, il était aussi membre du bureau et du secrétariat fédéral du PCF dans la Marne dont il a été écarté en 1948.
   En 1953, il a obtenu le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention FFI (Forces françaises de l'intérieur).
   Léo Borgniet est décédé le 12 juillet 1990 à Reims.

 

Claude BURGOD (1898-1945)



   Claudius Léon Burgod-Derrier dit Claude Burgod est né le 7 septembre 1898 à Souk-Ahras (département de Constantine, Algérie).
   Professeur de mathématiques à l'École pratique de commerce et d'industrie de Reims où il a été nommé en 1924, il a été muté ultérieurement à l'École professionnelle de Suresnes dans la Seine, puis en 1942 dans la section commerciale du collège Arago à Paris, mais il a continué de militer au sein de la fédération marnaise du Parti socialiste SFIO (Section française de l'Internationale ouvrière). Candidat à Reims aux élections législatives de 1936, il a été battu par le député-maire Paul Marchandeau.
   Membre du mouvement Libération-Nord, il appartenait avec Simon Cantarzoglou et ses camarades marnais Paul Schleiss et Raymond Guyot au groupe de résistance Les Cloches des Halles, qui organisait l’évasion de réfractaires du STO (Service du travail obligatoire) pris en charge par les résistants de la Bourse du travail de Reims.
   Il a été arrêté en décembre 1943 et incarcéré à Fresnes, puis interné à Compiègne. Déporté le 22 janvier 1944 à Buchenwald (matricule 43 086), il a ensuite été transféré à Flossenbürg où il est mort le 21 mars 1945, date et lieu retenus par le JO du 3 novembre 1987.
   Aux élections municipales d’avril-mai 1945, son nom a figuré sur la liste présentée à Reims par la SFIO, dans l’espoir de son retour.
   Claude Burgod a été homologué FFC (Forces françaises combattantes) et DIR (Déporté-Interné-Résistant). Il a reçu à titre posthume la Médaille de la Résistance avec rosette par arrêté du 10 janvier 1947 publié au JO du 11 janvier 1947.    Dans la Marne, à Reims, une plaque commémorative a été apposée en 1947 par la Ville de Reims à son domicile 5, rue de Tambour. Son nom figure sur le monument érigé dans le cimetière du Nord par la Fédération marnaise du Parti socialiste et sur le monument aux martyrs de la Résistance. Son nom a aussi été donné à une rue de Cormontreuil dans la banlieue de Reims
   À Paris, le nom de Claude Burgod figure sur une plaque apposée dans la cour du lycée Arago, et sur la plaque apposée 14, rue Sauval à la mémoire des résistants du réseau Les Cloches des Halles.
   Dans le Val de Marne, son nom est gravé sur la plaque commémorative de l’ENSET (École supérieure de l'enseignement technique) dont il a été élève, qui est apposée dans le hall de l’École normale supérieure de Cachan.
   Son nom a été donné à une rue de Suresnes dans les Hauts-de-Seine.
   Sa mémoire est honorée sur une tombe familiale au cimetière de Bonny-sur-Loire (Loiret) avec la mention « À la mémoire de Claude Burgod résistant déporté mort pour la France ».


Claudius Burgod

 

Jean CAZAUX (1912-2008), pseudonyme dans la Résistance : Jeannot

   Jean Louis Antoine Cazaux est né le 29 octobre 1912 à Campistrous (Hautes-Pyrénées).
   Instituteur suppléant à Dormans (Marne), il a été nommé instituteur titulaire à Damery (Marne) en 1934. En 1936, il a épousé Mathilde Laval et de cette union est né un fils.
   En février 1943, il a rejoint le Front national de lutte pour l'indépendance de la France.
   En août 1944, il a participé aux combats de la Libération dans les rangs des Francs-tireurs et partisans français (FTPF) et a siégé au sein du Comité local de Libération (CLL) de Damery.
   Il a été homologué FFI (Forces françaises de l'intérieur) avec le grade d'adjudant.
   Il est décédé le 10 janvier 2008 à Épernay (Marne).


Jean Cazaux

 

Alfred CHABAUD (1899-1944), pseudonyme dans la Résistance : Bayard
Notice biographique rédigée en 2013 par son petit-fils Hervé Chabaud, actualisée par Jean-Pierre et Jocelyne Husson en 2022

   Alfred, Emmanuel, Marie Chabaud est né le 12 novembre 1899 à Antibes (Alpes-Maritimes). Après un baccalauréat latin-grec-philosophie, une licence ès lettres, un diplôme d’études supérieures d’histoire et géographie, il a enseigné de 1923 à 1932 successivement au collège Frédéric Mistral en Arles, au collège de Revel ( Haute-Garonne ), au collège de Blois, au lycée Rollin de Paris, au lycée d’Oran, avant de rejoindre le collège d’Épernay.
   En 1932, il a été nommé professeur à l’École nationale des arts et métiers de Cluny, puis à celle de Châlons-sur-Marne en 1937.
   Lauréat 1937 de l’Académie des sciences morales et politiques, il a été chargé de recherches scientifiques en Italie, puis en Grande-Bretagne. Il a dénoncé avec vigueur le renoncement de la France et la signature de l’armistice par Pétain, a approuvé les quatre-vingts parlementaires qui ont refusé les pleins pouvoirs au maréchal, et s’est insurgé d’entrée contre les lois antijuives.    
   Docteur de 3e cycle pour ses travaux sur le révolutionnaire marseillais Barbaroux, il était venu avant-guerre analyser les conséquences de la Révolution française en Grande-Bretagne et préparait une thèse d’État sur les Girondins marseillais sous la direction de Georges Lefèvre, professeur à la Sorbonne. Son autorité comme la pertinence de ses raisonnements avaient impressionné lors de son séjour à la Maison de l’Institut de France à Londres en 1938, et ce n’est pas un hasard si l’un de ses collègues anglais l'a recommandé dès novembre 1940 aux services de renseignements britanniques.  
    Dès janvier 1941, Chabaud a travaillé pour eux. Révoqué de l’enseignement par le gouvernement de Vichy pour son appartenance à la Franc-maçonnerie, il a retrouvé un poste de responsable du Service des actes administratifs à la préfecture de la Marne, et il est devenu un agent clé du réseau Brutus-Nord dans la région. En effet, en raison de ses travaux de recherches sur les révolutionnaires marseillais, il a été aussi approché par son ami Pierre Fourcaud, le fondateur du réseau Brutus dont faisaient partie Félix Gouin et Gaston Deferre.   
     Après l’arrestation du lieutenant Louis-Armand Paillard, officier du génie, sur le quai de la gare de Reims au retour de l’un de ses déplacements à Paris, le 18 décembre 1943, la Gestapo a recherché tous les liens que l’Armée secrète pouvait avoir dans la Marne afin de porter un rude coup à la Résistance dans le département.
   Elle a appris notamment qu’à Châlons-sur-Marne, l'Armée secète avait un correspondant très important qui était un homme de grande taille, portant des lunettes et qui n’avait plus beaucoup de cheveux. Détail important, ce monsieur qui portait costume et cravate avait été révoqué par le gouvernement de Vichy. L’identification d’Alfred Chabaud était proche.
   Celui qui a laissé dans la nuit du 11 au 12 novembre 1943 près de Rosnay sa place au commandant Bertin, patron marnais du BOA ( Bureau des opérations aériennes), de l’Armée secrète et de CDLR (Ceux de la Résistance) au cours d’une double opération de récupération et de transfert à Londres par Lysander, était en danger.  
   Le 7 janvier 1944, Alfred Chabaud a quitté son appartement au 2e étage du 4, rue Chevalier à Châlons-sur-Marne. Il ignorait qu’il n’y reviendrait plus. Peu avant l’ouverture des services, des agents de la Gestapo ont surgi à la préfecture, rue Carnot et en ont bloqué les issues. Ils se sont précipités dans le bureau où travaillait l’ancien professeur. Alfred Chabaud était alors en possession d’un plan très détaillé de la prison de Châlons-sur-Marne, qu'il a eu juste le temps de dissimuler dans un placard. Le précieux document a été récupéré ultérieurement par son fils Jean.
   
Chabaud a été empoigné sans ménagement et transféré à Reims dans un véhicule où se trouvait aussi l’abbé Georges Carré arrêté la veille à Sainte-Ménehould.
   Le responsable de Brutus-Nord a été interrogé sur ses relations avec le BOA, sur la nature des renseignements qu’il avait collectés pour l’Armée secrète, et li a été sommé de produire un inventaire de tous les documents qu’il avait détournés à la préfecture de la Marne. Affreusement battu, Chabaud n'a pas parlé et il a été transféré à Compiègne.  
  Le 27 janvier 1944, vers 10 heures, un convoi de détenus qui venait de quitter le camp de Royallieu à Compiègne est arrivé en rang par cinq sur le quai de la gare. Sur le même rang qu’Alfred Chabaud se trouvaient trois Sparnaciens, le frère Birin des Écoles chrétiennes, Hubert Touvet ingénieur de la SNCF, et Jean Terver comptable, arrêtés à Épernay fin 1943-début 1944. Ils ont été alignés devant des wagons qui portaient la mention : « Huit chevaux ou quarante hommes ». Les SS n’en avaient rien à faire. Ils entassaient cent vingt cinq individus par wagon. Avant de refermer la porte, un SS suffisant s’est avancé et a déclaré : « Une dernière fois, je demande s’il y en a qui possèdent des couteaux. Ceux qui essayeront de s’évader seront fusillés ».
   Il était presque midi. Les wagons ont été cadenassés et il ne restait qu’une petite ouverture hérissée de barbelés pour avoir un peu d’air. Terver est parvenu à y jeter une lettre pour les siens alors que le convoi approchait de Laon. Plusieurs jeunes détenus ont bien eu l’intention de s’évader et, ni le frère Birin ni Alfred Chabaud ne les ont découragés. Ils s’avérèrent même d’utiles complices. Aussi les plus débrouillards qui étaient parvenus à dissimuler aux Allemands outils et couteaux à scie se sont mis à l’ouvrage.
   Entre Châlons-sur-Marne et Vitry-le-François une planche a été enlevée. Un premier prisonnier puis deux autres se sont laissés glisser sur le ballast avec beaucoup d’assurance. Soudain des coups de feu ont éclaté. Quatre détenus sont parvenus encore à sauter mais le neuvième a été criblé de balles. Le train a stoppé. Chabaud et Birin ont ordonné aux autres de se mettre à plat ventre. Sage décision car les sentinelles ont tiré à hauteur d’hommes.
   Le wagon a été ouvert et une fouille minutieuse a commencé tandis que pleuvaient les coups de nerfs de bœuf. Il manquait neuf prisonniers, aussi un SS a choisi au hasard neuf détenus qui, une fois entièrement nus, ont exécutés le long de la voie. Tous les autres ont dû également se dévêtir et ont été poussés dans un wagon métallique où ils ont été enfermés jusqu’à l’arrivée du convoi en gare de Trêves. Puis le train a continué jusqu’à Erfurt où il a stationné une journée entière. Les détenus n’avaientt alors ni à boire, ni à manger.  
   Dans la nuit du 31 janvier 1944, Chabaud, Birin et Terver arrivèrent à Buchenwald où ils furent sauvagement frappés et attaqués par des molosses, puis soumis à une quarantaine.
   Le 13 mars 1944, après une nuit glaciale passée sur la place d’appel du camp, ils ont été affectés au Kommando de Dora, où étaient assemblées les fusées A4-V2 et où les détenus Geheimnisträger (porteurs du secret) devaient être massacrés. Alfred Chabaud a reçu le matricule n° 43 635 et frère Birin le n° 43 652.
   Selon Le Livre des 9 000 déportés de France à Mittelbau-Dora, Alfred Chabaud a été transféré le 12 avril 1944 au camp de Harzungen (nom de code Hans) qui hébergeait les détenus du chantier B3, où il est décédé le 16 avril 1944.
   Selon Le Livre-mémorial des déportés de France, il a été transféré au Kommando d'Ellrich où il est décédé le 30 juillet 1944, lieu et date qui figurent sur son acte de décès transcrit le 4 octobre 1949 à l'état civil de Châlons-sur-Marne et qui sont retenus par l'arrêté du 17 avril 2012 publié dans le JO du 23 septembre 2012.  
  À Châlons-sur-Marne où on espérait son retour de déportation, une place lui avait été réservée au sein de la délégation municipale mise en place à la Libération pour administrer la ville.
  Le 18 mai 1945, le maire de la Libération, Irénée Dlévaque, lui a rendu un hommage solennel à l’Hôtel de ville.   Alfred Chabaud a été homologué membre des Forces françaises combattantes (FFC). Il a reçu à titre posthume la Légion d’honneur, la Croix de guerre 1939-1945 avec palme, la Médaille de la Résistance par arrêté du 24 avril 1946 publié au JO du 17 mai 1946, ainsi que le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention DIR (Déporté-Interné-Résistant).   À Châlons-en-Champagne, le nom d'Alfred Chabaud est inscrit sur une plaque commémorative apposée sur le mur extérieur de la prison, qui porte l'inscription : « Cette plaque a été posée par les familles et les amis des Châlonnais partis de cette prison pour les bagnes nazis où ils sont décédés après un long et douloureux martyre ». Le 18 juin 2003, le grand amphithéâtre de l’École nationale supérieure des arts et métiers a été baptisé du nom d’Alfred Chabaud.
   À Reims, dans le Square des victimes de la Gestapo, il figure sur la plaque commémorative qui honotre la mémoire des « Maîtres de l'École laïque victimes de la barbarie nazie ».
   À Paris, il est gravé sur le Mémorial du Grand Orient de France, 16 rue Cadet dans le 9e arrondissement, « À la mémoire des Frères Maçons fusillés, déportés, morts au combat, victimes des nazis et de leurs alliés ».


Alfred Chabaud déporté à Buchenwald, puis Dora
(1899-1944)

Christiane CHANTRENNE, née LEMOINE, épouse NOIZET après-guerre (1913-1996),
pseudonyme dans la résistance : Capitaine Charles

 

   Christiane Lemoine est née le 26 octobre 1913 à Ville-en-Selve (Marne). Elle a épousé Léon Chantrenne en 1937, année où elle a été nommée institutrice à Moiremont en Argonne marnaise, un poste qu’elle a occupé jusqu’en janvier 1944.
   Dès le retour de l’exode, elle s’est impliquée dans une filière d’évasion de prisonniers. Institutrice et secrétaire de mairie, elle leur a fourni des faux papiers et les a aidés à passer de zone interdite en zone occupée. En 1942, elle a rejoint CDLR-BOA (Ceux de la Résistance-Bureau des opérations aériennes de la France libre) sous les ordres d’Henri Bertin qui l'a chargée en 1943 de trouver un officier capable d’organiser l’action militaire dans l’arrondissement de Sainte-Ménehould. Elle a recruté André Noizet. Par l’intermédiaire d’Henri Bertin elle était aussi en contact avec les réseaux Kléber et Hector. Elle est venue en aide aux réfractaires du STO (Service du travail obligatoire) avec l’aide d’André Benoît, inspecteur du travail à Reims et futur intendant régional de Police à la Libération.
   Après l’arrestation d’André Noizet le 22 janvier 1944, Christiane Chantrenne a quitté la Marne. Christian Longetti, nouveau responsable BOA de la Marne, lui a proposé un poste à Paris ou dans les Ardennes où l’organisation du BOA venait d’être mise à mal par les arrestations de la fin 1943. Elle a choisi les Ardennes où elle est devenue responsable départementale sous le pseudo de « Capitaine Charles ».
   Au printemps 1944, elle est revenue dans la Marne pour y homologuer un terrain de parachutage au Nord-Est de Vitry-le-François. En juillet 1944, un accident de voiture l’a immobilisée. Le 3 septembre 1944, elle a participé au défilé de la Libération à Sainte-Ménehould aux côtés de Maurice Jaunet, chef du groupe FFI (Forces françaises de l'intérieur) de Sainte-Ménehould, de Charles Canonne successeur d’André Noizet à la tête de CDLR-BOA pour l’Argonne, et de Lucien Picq, chef du maquis Paulus.
   Christiane Noizet a reçu la Médaille de la Résistance avec rosette par arrêté du 3 août 1946 publié au JO du 13 octobre1946 et le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention FFC (Forces françaises combattantes).
   En 1958, elle a épousé André Noizet et lui a succèdé, après son décès en 1974, à la présidence de l’association CDLR-Argonne. Elle lui a voué un véritable culte et a fait graver son nom en tête de la liste des « Morts pour la France » sur la stèle de CDLR-Argonne de Vienne-le-Château. Elle a aussi fait refaire la plaque commémorative du Conseil général de la Marne à Châlons-sur-Marne (Châlons-en-Champagne), et y a fait inscrire le nom d’André Noizet en tête de la liste des « conseillers généraux du département de la Marne victimes de la barbarie nazie ».
   Elle est décédée en 1996.

 

René DEGUAY (1894-1946)



   René Georges Deguay est né le 1er novembre 1894 à Vertus (Marne). Il était le fils de Jules Deguay, vigneron, et de Julie Laurain, couturière.
   Il commença sa carrière d’instituteur à Esternay (Marne), poste qu’il occupait lorsqu’il fut incorporé le 1er septembre 1914. Blessé au front le 18 août 1916 à Vaux-Chapitre (Meuse), il a été décoré de la Croix de guerre avec étoile d’argent et la citation : « Officier d’une ardeur héroïque poussée au suprême degré, sachant communiquer avec ses hommes par son allant et son courage, a sauvé à diverses reprises et sous violent bombardement de nombreux hommes de sa section ensevelis sous des tranchées comblées. A été blessé au moment où il se portait à la tête de sa section pour l’entraîner à l’assaut ».
   Le 24 août 1918 il a épousé Jeanne Odette Beiller à la Forestière (Marne).
   En 1923, René Deguay a été nommé instituteur à Mécringes (Marne). Lieutenant de réserve, il a été rappelé à l’activité en septembre 1938 (avant les accords de Munich) puis à nouveau fin août 1939.
   Il a été élevé au grade de chevalier de la Légion d’honneur par décret du 5 septembre 1939 publié au JO du 15 janvier 1940.
   Fait prisonnier en juin 1940, il a été interné à l’Oflag II D en Poméranie. Libéré comme ancien combattant de la première guerre mondiale, il a repris son poste à Mécringes. Sa fonction de secrétaire de mairie lui a permis de rendre de nombreux services et il s’est engagé dans la Résistance.
   Au cours de l’été 1942 René et Odette Deguay, couple sans enfants, ont accueilli chez eux cinq enfants juifs parisiens âgés de 3 à 9 ans : Fernand et Eveline Worona ainsi que Jacques, Jeannette et Renée Grojzdyk, et ils s’en sont occupés jusqu’à la Libération.
   René Deguay a participé activement à l’action résistante comme chef de centaine FFI (Forces françaises de l'intérieur) dans le groupe 14 de Montmirail appartenant au secteur C de l’arrondissement d’Épernay (Marne).
   René Deguay est décédé accidentellement le 1er novembre 1946.  
   Il a été homologué FFC (Forces françaises combattantes) au titre du réseau Action D.
   Le 8 juillet 2009, Yad Vashem a décerné le titre de « Justes parmi les Nations » à René et Odette Deguay, pour avoir sauvé cinq enfants juifs.

 

Irénée DLÉVAQUE (1900-1970)

   Irénée Aimé Urbain Eugène Octave Dlévaque est né le 11 novembre 1900 à Valenciennes (Nord). Il était le fils d'Aimé Auguste Dlévaque, professeur, et de Marie Rose Eugénie Cardon, sans profession. En septembre 1928, il a épousé Zélia Éléonore Mascré à Templeux-la-Fosse (Somme).
   Professeur de mathématiques depuis 1929 au lycée de Châlons-sur-Marne (Châlons-en-Champagne), père de six enfants, Irénée Dlévaque était un militant du parti socialiste SFIO (Section française de l'Internationale ouvrière). Malgré l’échec du Front populaire, il était parvenu avec Lucien Draveny à créer en 1938 avec Sigismond Moszkowski et les responsables communistes châlonnais une éphémère « Section unique de la classe ouvrière » qui a été condamnée et rejetée par la Fédération marnaise de la SFIO. Exclus du Parti socialiste en mars 1939, il y a rapidement été réintégré.
  Selon Georges Clause qui a rédigé sa notice biographique dans Le Maitron-Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier, Irénée Dlévaque, dénoncé par des élèves, a été « révoqué par le préfet de Vichy à la suite d’une plaisanterie sur le chef de l’État français : refusant d’acheter à un de ses élèves une carte à l’effigie de Pétain, il déclara qu’il ne collectionnait pas les vieux tableaux. Pour vivre et pour nourrir sa famille, il dut entrer dans les services municipaux du ravitaillement, où il lui arriva de manifester sa rude intégrité. Il fut chargé de la distribution des bons de chaussures. Il participa rapidement à la Résistance et devint un des dirigeants de Libération-Nord ».
  Selon l'abbé Pierre Gillet il « détestait Vichy, les Allemands et les curés » et il était « le plus pittoresque et le plus connu » des résistants de Libération-Nord.
   Irénée Dlévaque a participé fin 1941 avec Maurice Mennecier à la première réunion du Parti socialiste clandestin organisée à Châlons par Lucien Draveny. À la demande de Gabriel Thierry, employé SNCF châlonnais muté à Troyes en 1941, qui avait été secrétaire de la Fédération marnaise du Parti socialiste avant-guerre, il a implanté avec Lucien Draveny et Maurice Mennecier le mouvement Libération-Nord à Châlons-sur-Marne. Il était chargé du recrutement, du renseignement et de la diffusion de la presse clandestine. Il hébergeait, convoyait des prisonniers de guerre évadés, des résistants traqués par la Gestapo, des réfractaires au STO, des déportés transférés en Allemagne évadés de trains traversant la Marne, ainsi que des pilotes alliés abattus au-dessus de la région, et leur fournissait de faux-papiers. Il a aussi participé à des opérations de sabotage avec des membres de Résistance- Fer.
   Dans la nuit du 13 au 14 juillet 1944, Irénée Dlévaque est monté au sommet du dôme de l’Hôtel-de-Ville de Châlons pour y déployer le drapeau français.
   Membre du Comité local de la Libération (CLL), il a présidé la délégation municipale spéciale mise en place à Châlons à la Libération pour administrer la ville, et il a été élu maire à l’issue des élections municipales provisoires d’avril-mai 1945, poste qu'il a occupé jusqu'aux élections municipales de 1947.
  Irénée Dlévaque a reçu la Médaille de la Résistance avec rosette par arrêté du 24 avril 1946, publié au JO le 17 mai 1946, et le titre de Combattant volontaire de la Résistance  en 1957.
   Il est décédé le 24 août 1970 dans la Somme
  Une rue de Châlons-en-Champagne porte son nom.

 

Jacques DORÉ (1904-1942)



   Né le 7 juin 1904 à Champcevrais (Yonne), fusillé après condamnation à mort le 29 avril 1942 à Châlons-sur-Marne (Châlons-en-Champagne, Marne) ; professeur ; militant communiste.
   Jacques Doré était le fils d’Albert Joseph Germain Doré, instituteur, et d’Ida Rameau, institutrice. Célibataire, domicilié à Vitry-le-François (Marne), où il était professeur d’anglais au collège de cette ville.
   Il était secrétaire depuis 1936 de la section locale de la Ligue des droits de l’Homme. Il avait effectué avant-guerre des voyages en Italie et en Allemagne d’où il était revenu avec de profondes convictions antifascistes. Militant du parti communiste, fiché par la police, il était président local des Amis de l’URSS. Le 22 novembre 1936, il participa au congrès régional des Amis de l’Union soviétique en tant que délégué de Vitry-le-François.
   Mobilisé en septembre 1939, il servit comme interprète auprès des troupes britanniques. Démobilisé et rentré à Vitry-le-François, il fut arrêté sur dénonciation par la Police allemande en avril 1942, vraisemblablement le 14, pour avoir tenu des propos hostiles aux troupes d’occupation et avoir affirmé qu’il considérait « comme certaine la victoire des Russes et des Anglais ».
   Inculpé pour propagande anti-allemande, il a été condamné à mort le 23 avril 1942 par le tribunal militaire allemand FK 531 de Châlons-sur-Marne. Il a refusé de signer son recours en grâce. Malgré les interventions du préfet de Vichy, René Bousquet, et du secrétaire général du département de la Marne, Richard Pouzet, qui avaient été tous les deux sous-préfets de Vitry-le-François, il a été fusillé le 29 avril 1942, vraisemblablement selon Pierre Gillet au stand de tir de Châlons-sur-Marne, avenue du Général-Sarrail.
   Après l’exécution de Jacques Doré, le préfet de Vichy, René Bousquet, fit opposition à l’avancement de son dénonciateur, le capitaine de gendarmerie Savre. Ce dernier a été fusillé au lendemain de la Libération.
   Le jugement déclaratif de décès prononcé le 29 mai 1942 par le tribunal de première instance de Châlons-sur-Marne, et transcrit à l’état civil de Vitry-le-François le 6 juin 1942, dit que Jacques Doré « est décédé le 29 avril 1942 à six heures cinquante-huit minutes à Châlons-sur-Marne, du fait d’événements de guerre » et que ce jugement « tiendra lieu d’acte de décès du sus-nommé. »
   Jacques Doré a été reconnu « Mort pour la France » en 1947.
   Inhumé initialement dans le carré des fusillés, dit carré Ulmann, de la nécropole nationale de Châlons-sur-Marne, le corps de Jacques Doré a été exhumé après la guerre et ré-inhumé dans une sépulture individuelle du cimetière de l’Est qui jouxte la nécropole.
   Dans la Marne, le nom de Jacques Doré est inscrit sur la plaque commémorative érigée sur le site de la Butte des fusillés à L’Épine, plaque qui situe par erreur son exécution le 1er mai 1942. Il figure aussi sur le monument aux morts de Vitry-le-François où il est inscrit par erreur comme déporté, et sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » apposée dans le Square des victimes de la Gestapo, 18 rue Jeanne-d’Arc à Reims.
   Dans l’Yonne, son nom est gravé sur le monument aux fusillés et déportés d’Auxerre.


Jacques Doré

 

Robert DUTERQUE (1907-1945), pseudonyme dans la Résistance : Lieutenant Philippe



 

   Robert Gaétan Duterque est né le 11 mars 1907 à Huby-Saint-Leu (Pas-de-Calais). Il était le fils de Louis Augustin Duterque, brigadier-maréchal au 6e Régiment de chasseurs à cheval, et d'Azélie Alexandrine Auger, sans profession. Le 3 août 1933, il avait épousé à Reims Madeleine Yvonne Bihan et le couple qui résidait à Reims (Marne) avait deux garçons, Jean et Alain.
   Formé à l’École normale d'instituteurs de Châlons-sur-Marne, il a été nommé instituteur à l’école du Boulevard des Belges à Reims où il exerçait dans l’une des premières classes de perfectionnement créées dans cette ville. Il était très actif dans l’encadrement d’activités pré et post scolaires. Militant syndical, membre du Parti sociaiste SFIO (Section française de Internationale ouvrière) depuis 1930 et secrétaire local du Front populaire, il a participé avant-guerre à la rédaction du journal Le Travail de la Marne, organe du Parti socialiste dans la Marne.
   Robert Duterque, qui avait perdu accidentellement un œil, n’a pas été mobilisé en septembre 1939. Il s'est néanmoins engagé dès janvier 1941 dans l’action clandestine et il a rejoint, avec ses camarades Claude Burgod, Raymond Guyot et Paul Schleiss, le groupe de Résistance Les Cloches des Halles implanté à Paris par Libération-Nord. En 1943, il s'est fait établir à Troyes une fausse carte d’identité au nom de « Jean Alain (prénoms de ses deux fils) Dumont, professeur de musique né à Bastia en Corse », et c’est sous le pseudonyme de « Lieutenant Philippe », qu’il est devenu responsable militaire de Libération-Nord dans l’arrondissement de Reims. Le 8 février 1944, il a été désigné pour siéger avec Edmond Forboteaux au Comité départemental de libération nationale de la Marne (CDLN) au titre de Libération-Nord.
   Le 13 juin 1944, il a été arrêté en même temps que plusieurs de ses camarades. Interné dans les prisons de Reims, puis de Châlons-sur-Marne, il a été transféré à Compiègne et déporté comme résistant le 15 juillet 1944 à Neuengamme (matricule 37 084). Il a été affecté au Kommando de Bremen-Farge et soumis au travail forcé dans la construction de l’abri sous-marin Valentin.
   Les circonstances de son décès ont fait l’objet d’informations contradictoires. Au lendemain de la guerre, Le Travail affirmait qu’il était mort d’épuisement à Neuengamme. Le Livre-mémorial des déportés de France ne donne aucune indication. Les archives du COSOR (Comité des œuvres sociales des organisations de Résistance) font mention de sa disparition sur un des bateaux coulés par erreur par l’aviation britannique en baie de Lübeck le 3 mai 1945, hypothèse qui semblait la plus vraisemblable, mais qui a été infirmée par les recherches effectuées en 2007 dans les archives allemandes par la famille de Robert Duterque. En réalité, il a fait partie d’un groupe de déportés de Bremen-Farge qui ont été rassemblés dans le camp de Watenstedt, puis qui ont été transférés par train dans des conditions effroyables à Ravensbrück où les survivants sont arrivés le 14 avril 1945. Enregistré sous le matricule 19 127, Robert Duterque y est décédé vraisemblablement au début du mois de mai 1945. En juillet 2011, sa mort en déportation n’était toujours pas enregistrée au JO de la République française.
   Robert Duterque a été homologué FFI (Forces françaises de l'intérieur) et DIR (Déporté-Interné-Résistant) et il a reçu à titre posthume la Médaille de la Résistance par arrêté du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946.
   À Reims où une allée du quartier Croix-Rouge porte son nom depuis 1971, le nom de Robert Duterque est inscrit sur le Monument aux martyrs de la Résistance et de la Déportation, sur la plaque apposée à la Bourse du Travail aujourd’hui Maison régionale des syndicats, sur la stèle élevée par le Parti socialiste SFIO au cimetière du Nord et sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » dans le Square des victimes de la Gestapo. Dans le hall de l’école Jean Macé, boulevard des Belges, où il a enseigné, une plaque lui rend hommage..
   À Châlons-en-Champagne, son nom est inscrit sur la plaque « 1939-1945 »érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale d'institutrices, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
   À Paris, le nom de Robert Duterque est inscrit sur la plaque apposée 14, rue Sauval à la mémoire du groupe de résistance Les Cloches des Halles.

 

Armande GANDON (1919-1945)





   Armande Gandon est née le 11 août 1919 à Saint-Léger-des-Vignes (Nièvre). Elle était la fille posthume d'Armand Gandon, décédé quatre jours avant sa naissance, et de Marie Landreau, sans profession.
   Domiciliée à Reims (Marne), elle militait avant-guerre au sein des organisations de jeunesse du Parti communiste.
   Sous l'Occupation, responsable avec Simone Bastien de l’Union des jeunes filles de France dans la Marne, elle était surveillée par la Police française. Capitaine d’une équipe de basket-ball, c’est à la faveur de rencontres sportives qu’elle transmettait les mots d’ordre de la direction clandestine du PCF, transportait et diffusait les tracts et journaux clandestins acheminés depuis la région parisienne par des employés de la SNCF.
   En juillet 1941, elle a échappé de peu à une arrestation, alors qu’elle se rendait chez les Arvois de Fère-Champenoise pour leur apporter des tracts. Gilberte Arvois a réussi à la prévenir que son fils Roger venait d’être arrêté. Armande Gandon quitta aussitôt la Marne où elle était grillée et passa à la clandestinité dans l’Aube, où elle rejoignit l’état-major régional des Francs-tireurs et partisans français (FTPF).
   Le 13 août 1941, inculpée par le juge d’instruction d’Épernay, elle a été condamnée par défaut à 4 ans de prison et 500 francs d’amende.
   Le 5 mars 1942, elle a été arrêtée à Troyes et condamnée par un tribunal militaire allemand à 10 ans de forteresse. À l’origine de son arrestation, il y a la déposition de Jean-Pierre Ringenbach, responsable du Front national de lutte pour l’indépendance de la France dans l’Yonne et l’Aube. Arrêté par la Gestapo dans un meublé de Sainte-Savine le 22 janvier 1942, lors d’une opération de police à la recherche des auteurs d’un attentat contre le Soldatenheim de Dijon, Ringenbach résista à la torture, et fut condamné à mort. La la veille de son exécution, enivré par ses gardiens, il craqua et révèla tout de l’organisation du Front national et de ses militants. Dans l’Yonne, plusieurs résistants furent arrêtés et fusillés ;dans l’Aube, la Gestapo procéda à deux arrestations dont celle d’Armande Gandon.
   Le 4 mars 1943, Armande Gandon a été déportée NN en Allemagne. Elle a été emprisonnée à Aix-la-Chapelle, à Flussbach, à Breslau où elle a été condamnée à mort, puis à Jauer. Libérée le 11 février 1945 par l’Armée rouge, elle est morte du typhus à l’hôpital de Liegnitz le 22 avril 1945, lieu et date retenus par le JO du 23 mai 1992.
   Sa sœur aînée, Jeanne Andrée Paté a été déportée en avril 1943 à Ravensbrück, et affectée au Kommando d'Holleischen où elle a été libérée le 5 mai 1945 par des partisans tchèques et polonais.
   Armande Gandon a reçu à titre posthume la Médaille de la Résistance par arrêté du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946.
   À Reims, une plaque commémorative a été apposée en 1947 par la municipalité à son domicile 15, rue de la Bonne femme et elle figure sur le Monument aux martyrs de la Résistance et de la Déportation. Une rue du quartier Croix-rouge porte son nom depuis 1971. Sa mémoire est également honorée sur une sépulture familiale au cimetière du Sud. Bien que recensée comme institutrice par André Aubert qui a participé dans la Marne à l'enquête nationale sur la Déportation pilotée par le Comité d'histoire de la 2e guerre mondiale, elle ne figure pas sur la plaque commémorative dédiée aux « Maîtres de l'école laïque victimes de la barbarie nazie » apposée dans le Square des victimes de la Gestapo.
   Dans l’Aube, une rue de Sainte-Savine porte son nom.
   Armande Gandon a reçu à titre posthume le titre de Combattant volontaire de la Résistance et la Médaille de la Résistance par arrêté du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946.

 

Roger GARITAN (1900-1945)






    Roger Garitan est né le 18 avril 1900 à Mutigny (Marne).
   Après des études à l’école normale d'instituteurs de Châlons-sur-Marne, il a occupé en 1919 son premier poste d’instituteur à Florent-en-Argonne. Il a suivi la préparation militaire à Saint-Cyr dont il est sorti second en 1921 avec le grade de sous-lieutenant. Il a été nommé instituteur à Mutigny en 1922, à Vandières en 1926 puis, à la rentrée de 1932, à Villers-Allerand. Il était actif au sein du Syndicat des instituteurs et dans le milieu associatif. C’est ainsi qu’il a fondé l’Association sportive de Villers-Allerand.
   Faisant fonction de secrétaire de mairie, Roger Garitan a fourni dès janvier 1941 des fausses cartes d’identité et d’alimentation à des prisonniers évadés, puis à partir de la fin 1942 à des réfractaires du STO (Service du travail obligatoire). Militant socialiste, il entra en contact avec des responsables rémois de Libération-Nord à partir de janvier 1943. Il a constitué à Villers-Allerand un groupe de résistants qui reconnaissait des terrains de parachutage dans les environs et il a organisé des équipes de réception.
   Roger Garitan a été arrêté le 21 février 1944 à Villers-Allerand. Son beau-frère Pierre Florion, membre de Résistance-PTT, a été interpellé le même jour au Central téléphonique de Reims. Interné à la prison Robespierre de Reims, puis transféré à Compiègne le 8 mai, Roger Garitan a été déporté le 21 mai 1944 à Neuengamme (matricule 31 547). Affecté au Kommando de Fallersleben-Laagberg, il a ensuite été évacué sur Wöbbelin où il est décédé le 14 avril 1945 selon le Livre-mémorial des déportés de France. Le JO du 18 août 1992 situe son décès à Ludwigslust le 15 avril 1945.
   Roger Garitan a reçu à titre posthume la Médaille de la Résistance par arrêté du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946 et le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention DIR (Déporté-Interné-Résistant).
   Le 14 avril 1946, une plaque commémorative a été apposée dans la salle de classe où il a enseigné, baptisée « Classe Roger Garitan ». À l’initiative d’anciens élèves, son nom a été donné à l’école de Villers-Allerand et le 10 mai 2003, une nouvelle plaque a été apposée à l’entrée de l’école.
   Le nom de Roger Garitan est gravé sur le monument aux morts de Villers-Allerand.
   À Reims, il figure sur la stèle élevée par le Parti socialiste SFIO au cimetière du Nord et dans le Square des victimes de la Gestapo, sur la plaque qui honore la mémoire des « Maîtres de l'école laïque victimes de la barbarie nazie ».
   À Châlons-en-Champagne, son nom est inscrit sur la plaque 1939-1945 érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale d'institutrices, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
   Dans le cimetière communal de Mareuil-sur-Aÿ, une inscription et une plaque apposées sur une sépulture familiale rappellent son souvenir.
   En Allemagne, sur le site du camp-mouroir de Wöbbelin, son nom est gravé sur l’un des pavés du chemin portant les noms ou les matricules des déportés décédés en ce lieu ou lors de leur transfert.

 

Henri GIRAUD (1918-2000)

   Henri Paul Pascal Giraud est né le 28 septembre 1918 à Aÿ (Marne). Il était le fils de Léon Giraud, cheminot et vigneron, et de Madeleine Hémart. Célibataire, il exerçait la profession d'instituteur à Aÿ où il était domicilié.
   Fait prisonnier le 19 juin 1940, il a tenté de s’évader du camp de Montargis dans le Loiret le 2 septembre. Blessé et repris, il s’est évadé du camp de Fontainebleau le 19 novembre 1940 et il est passé en zone non occupée où il a été incorporé au 27e Régiment d'infanterie avec le grade de lieutenant. Démobilisé le 3 décembre 1941, il a obtenu un poste d'instituteur à Saint-Martin l'Ars dans la Vienne. Le 15 juillet 1943, il a été arrêté à Prades (Pyrénées-Orientales) par la Gestapo alors qu'il tentait de franchir les Pyrénées pour rejoindre l’Armée d’Afrique. Incarcéré à Arles-sur-Tech, puis à Perpignan, il a été transféré au camp de Compiègne et déporté le 3 septembre 1943 à Buchenwald (matricule 20 426), et affecté au Kommando de Schönebeck au sud de Magdebourg. En octobre 1944, il a été transféré au Block 17 de Dora, puis au Kommando Rottleberode où la firme Thyrawerke fabriquait des trains d'atterrissage. Le 4 avril 1945, il a été évacué vers le camp d'Oranienburg où il est arrivé le 16 avril, et où il a été libéré par l'Armée rouge le 2 mai.
   Il a été rapatrié le 29 mai 1945 en France où il a été pris en charge par le Centre d'Hazebrouck (Nord).
   Henri Giraud a obtenu le titre de Combattant volontaire de la Résistance avec la mention DIR (Déporté-Interné-Résistant).
   Après la 2e guerre mondaile, il a repris son poste d'instituteur à Aÿ, s'est engagé au sein de la Fédération nationale des déportés internés et résistants patriotes (FNDIRP), a milité au sein du Syndicat national des instituteurs (SNI) et a adhéré au Parti communiste.
   En 1964, il a pris une retraite anticipée, a exploité les vignes de ses parents, a adhéré au Syndicat des vignerons et a créé la maison de champagne Henri Giraud.
   Il a exercé pusieurs mandats au sein du conseil municipal d'Aÿ.
   Il est décédé en janvier 2000.

Jean-Pierre GRILL, en religion Frère ARBAUD Joseph (1895-1945)

   Jean-Pierre Grill, en religion Frère Arbaud Joseph, est né le 25 mai 1895 à Breidenbach (Moselle annexée)
   Enseignant au collège de Momignies en Belgique, transféré dans les locaux du Collège du Sacré Cœur à Reims, il a manifesté des sentiments anglophiles et gaullistes. Arrêté le 18 mars 1943 par la Gestapo, il a été incarcéré à Reims et à Châlons-sur-Marne, puis interné à Compiègne et déporté comme résistant le 3 mai 1943 à Sachsenhausen (matricule 66 265). Il a été affecté au kommando de Küstrin où sa connaissance de l’allemand lui a permis d’aider des camarades et où il a été astreint à des travaux de terrassement. Transféré en février 1945 à Buchenwald, il y est décèdé le 7 avril 1945, lieu et date retenus par le JO du 23 mars 1994. Ses camarades de déportation ont déclaré qu'il était décédé après l'évacuation du camp au cours d’une « marche de la mort ».
   À Reims, une plaque commémorative a été apposée en 1947 par la municipalité dans l'enceinte Collège du Sacré-Cœur 86, rue de Courlancy et son nom est inscrit sur le Monument aux martyrs de la Résistance et de la Déportation.

 

Georges GUILLAUME (1900-1944)

   Georges Ernest Anatole Guillaume est né le 24 mai 1900 à Suippes (Marne).
   Directeur d’école à Saint-Memmie (Marne), il a rejoint à partir de mars 1943 le groupe CDLR-BOA-CDP3 (Ceux de la Résistance-Bureau des opérations aériennes de la France libre) de Châlons-sur-Marne ou groupe Tritant, du nom de son chef.
   Il a effectué des liaisons avec Paris et a participé à des opérations de parachutage, de transports d'armes et d'explosifs.
   Obligé de s'enfuir pour échapper à la Gestapo lors du coup de filet de septembre 1943 et des arrestations en chaîne qui ont décimé le groupe Tritant, il a été nommé, avec la complicité de l’inspecteur d’académie Jules Heller et sous un nom d’emprunt, instituteur à Palaiseau, en Seine-et-Oise avec son épouse Germaine, elle aussi institutrice.
   Le 3 juin 1944, le couple Guillaume a été tué au cours d’un bombardement allié sur le noeud ferroviaire de Massy-Palaiseau.
   Georges Guillaume a été homologué FFL (Forces françaises libres). Il a reçu à titre posthume le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention FFC (Forces françaises combattantes) et la Médaille de la Résistance par arrêté du 29 novembre 1946, publié au JO du 8 décembre 1946.
   À Saint-Memmie, le nom de Georges Guillaume est inscrit sur le monument aux morts et sur la plaque 1939-1945 apposée à l’intérieur de la mairie.
   À Reims, il est inscrit sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » apposée dans le Square des victimes de la Gestapo.
   À Châlons-en-Champagne, il figure sur la plaque 1939-1945 érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale d'institutrices, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ). .

 

Lucien HESS (1900-1986)

   Lucien Marie Hess est né le 7 juin 1900 à Reims.
   L’abbé Hess était directeur de la Maîtrise de la cathédrale de Reims et de la colonie de vacances du Goulot près de Jonchery-sur-Vesle (Marne). N’appartenant à aucun réseau ou mouvement, il a agi en isolé. Il est venu en aide à des prisonniers de guerre évadés. Il a fabriqué des faux papiers d’identité. Il a caché en décembre 1943 Pierre Bouchez, chef départemental des FFI (Forces françaises de l'intérieur) et André Schneiter, chef des FFI de l'arrondissement de Reims, qui étaient recherchés par la Gestapo. Il a accueilli au Goulot des enfants juifs inscrits comme colons. En janvier 1944, il a aidé Jean-Marie Leroux à se procurer des faux-papiers pour la jeune juive Mathilde Rosenberg qui a été mise à l’abri à Lisieux puis dans le Tarn. C’est à la même époque qu’il a caché à la Maîtrise son ami l’abbé Roland Fontaine recherché par la Gestapo, avant son départ pour le maquis du Banel en Belgique. Il a hébergé aussi à plusieurs reprises Jean Nauroy qui travaillait pour une filière d’évasion belge.
   Le 9 juillet 1944, il a été arrêté à Reims. Incarcéré à Reims puis à Châlons-sur-Marne, il a été déporté comme résistant le 19 août 1944 à Natzweiler-Struthof (matricule 22 808 ). Début septembre 1944, il a été transféré à Dachau (matricule 100 001) où il a été libéré le 29 avril 1945. Il est rentré en France le 14 mai 1945.
   Dès son retour de déportation, Lucien Hess a témoigné dans le " Rapport sur les travaux de l'année 1944-1945 de l'Académie nationale de Reims " présenté par son secrétaire général, René Druart.
   Il a été homologué RIF (Résistance interieure française) et il a obtenu le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention DIR (Déporté-Interné-Résistant). Il a reçu la Médaille de la Résistance par arrêté du 24 avril 1946 publié au JO du 17 mai 1946.
   Lucien Hess est décédé à Reims le 12 avril 1986.
   Une rue de Reims porte son nom depuis 1987.
   Le 23 mars 2005, une conférence en hommage à Lucien Hess s'est tenue à la Maison diocésaine Saint-Sixte de Reims, à l'initiative de la délégation marnaise des Amis de la Fondation pour la mémoire de la déportation (AFMF-51) et de Benoît Hess, son neveu. Au cours de cette conférence donnée par Antoinette Hess, sœur de Lucien Hess, de précieuses informations ont pu être apportées sur sa déportation et sur son retour à Reims.


Arrestation et déportation de Monsieur le chanoine Hess
9 juillet 1944-29 avril 1946

 

Jean HUE (1914-1945) 





   Jean Hue est né le 14 février 1914 à Corroy (Marne).
   Instituteur à Corroy de 1933 à 1935, il a été détaché peu avant la 2e guerre mondiale au Lycée français de Salonique. En avril 1941, il a été expulsé de Grèce qui venait d’être envahie par la Wehrmacht et il rentra à Reims où il a été révoqué par le gouvernement de Vichy. Père d’un bébé né en 1942, il a obtenu un emploi dans les services du Contrôle économique où il collectait des renseignements pour le Front national de lutte pour l’indépendance de la France auquel il avait adhéré. Il était aussi en liaison avec des résistants des PTT.
   Arrêté le 13 juin 1944 à Reims à son domicile, il a été incarcéré à Châlons-sur-Marne, puis interné à Compiègne. Déporté comme résistant le 15 juillet 1944 à Neuengamme (matricule 37 066), il a été transféré dans le Kommando de Bremen-Osterort, soumis au travail forcé et affecté à la construction d’un bunker pour sous-marins. Il y est décédé le 2 avril 1945, date retenue par le JO du 1er décembre 1992.
  Jean Hue a été homologué FFC (Forces françaises combattantes), FFI (Forces françaises de l'intérieur) et il a reçu le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mentioin DIR. (Déporté-Interné-Résistant).
    À Reims, une plaque commémorative a été apposée en 1947 par la municipalité à son domicile 28, rue Libergier. Son nom est inscrit sur le Monument aux martyrs de la Résistance et de la Déportation, sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » apposée dans le Square des victimes de la Gestapo et sur la plaque érigée « À la mémoire de nos camarades tombés dans la lutte pour la liberté victimes de la barbarie (allemande a été effacée) nazie » à la Bourse du Travail aujourd’hui Maison régionale des syndicats.
    À Châlons-en-Champagne, son nom est inscrit sur la plaque 1939-1945 érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale d'institutrtices, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
   À Épernay, il figure sur la liste des « Déportés » du Monument aux martyrs de la Résistance.
   À Corroy, une plaque commémorative honorant sa mémoire a été apposée à l'intérieur de la Mairie et son nom est gravé sur le monument aux morts communal.

 

Maurice JOUSSIER (1899-1945)

   Fils d'Albert Joussier, instituteur, et de Maria Noémi Michel, sans profession, Maurice Louis Joussier est né le 28 février 1899 à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire). Normalien, engagé volontaire, il avait participé à la campagne de Pologne contre la jeune Russie soviétique. Gazé et devenu aveugle, il avait été hospitalisé le 6 décembre 1922 à Constantinople, puis rapatrié à l'Hôpital militaire Michel-Lévy de Marseille. Il avait retrouvé partiellement la vue et était pensionné g à 85% .Instituteur et secrétaire de mairie à Lignon (Marne), il avait épousé Anna Desnaud et le couple avait trois enfants à charge.
    Soupçonné d'avoir fait parvenir des vêtements à son frère, prisonnier de guerre au Stalag VI D qui s'était évadé d'Allemagne et était passé en zone Sud, il a été arrêté par la Feldgendarmerie de Vitry-le-François le 10 février 1943. Selon un rapport de a Gendarmerie française daté du 23 mars 1943, il aurait été « inculpé de complicité d'évasion de parachutistes ». Interné à la prison de Châlons-sur-Marne, puis transféré à Compiègne, il a été déporté comme déporté-politique par le convoi du 8 mai 1943 arrivé le 10 mai à Sachsenhausen-Oranienburg où il a reçu le matricule 66 528.

   « Au matin du samedi 8 mai 1943, les détenus quittent en colonnes le camp de Compiègne-Royallieu et se dirigent vers la gare de la ville. Là, ils montent de force dans des wagons prévus pour accueillir 40 hommes. Ils sont au moins le double. Le train quitte la gare de Compiègne en milieu de matinée, mais, pendant sa marche vers l’Allemagne, il doit s’arrêter à plusieurs reprises en raison de tentatives d’évasion. Peu avant la frontière allemande, les Allemands font descendre les hommes des wagons et leur font ôter leurs chaussures afin de les dissuader de toute nouvelle tentative. Ainsi, il semble qu’un seul homme ait réussi à s’évader, peu après le départ, à Coucy-lès-Eppes, dans le département de l’Aisne.
   Après deux jours de trajet, marqués par la chaleur et la soif, le train stoppe en gare d’Oranienburg le lundi 10 mai, vers 2 heures du matin. Les détenus sortent des wagons sous les cris des SS et tous ne parviennent pas, dans la semi-obscurité, à retrouver leurs chaussures, jetées en tas sur le quai. Déjà, ils doivent se mettre au pas de gymnastique afin de rejoindre le camp de Sachsenhausen distant de quatre kilomètres environ. Ils y pénètrent par la porte centrale, surmontée de la devise Arbeit macht frei, vers 2 heures et demie du matin environ, puis ils subissent les opérations de désinfection et d’enregistrement. Au petit jour, ils sont regroupés sur la place centrale du camp pour y connaître leur premier appel. »

Livre-Mémorial des déportés France, FMD, 2004

   Les circonstances du décès de Maurice Joussier sont mal connues. Le Livre-mémorial des déportés de France le dit évacué début avril 1945 vers Bergen-Belsen et porté disparu. Selon des camarades déportés survivants, il serait redevenu aveugle et aurait été séparé de leur groupe. Selon le JO du 21 octobre 1994, il est décédé le 14 février 1945 à Oranienburg, date et lieu qui figurent en marge de son acte de naissance à l'état-civil de Chalon-sur-Saône.

   Maurice Joussier a été reconnu « Mort pour la France ». Il n'a été homologué dans aucun mouvement de Résistance et il n'a pas reçu le titre de Déporté-Interné-Résistant (DIR).
   Il est possible qu'il ait agi comme résistant isolé en utilisant sa fonction de secrétaire de mairie pour fournir des faux papiers à des prisonniers de guerre évadés, à des réfractaires au Service du travail obligatoire (STO), ou à des personnes recherchées par la Police française et/ou allemande.

  À Lignon, le nom de Maurice Joussier est inscrit sur une plaque apposée sur la façade de la mairie.
  À Châlons-en-Champagne, il figure sur la plaque « 1939-1945 » érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale d'institutrices, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
  Son souvenir est également conservé à Reims dans le Square des victimes de la Gestapo, sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie ».

 

Henri KINET : pseudonyme dans la Résistance : capitaine Mercier

      Né en 1910 à Reims (Marne). Henri Lucien Kinet était le fils d'Eugène Pierre Kinet, employé des Postes et de Lucie Jeanne Cattier, sans profession. Il a épousé Louise Marie Leschi à Avize le 26 août 1933. De cette union sont nés quatre enfants.
   Ancien élève de École normale d'instituteurs de Châlons-sur-Marne, Châlons-en-Champagne, Marne), il a exercé la profession d'instituteur à Mourmelon-le-Grand, à Avize et à Dormans.
   Il a participé à la campagne de France dans un régiment d'artillerie en mai-juin 1940.
   Démobilisé après l’armistice du 22 juin 1940, il repris son poste à Dormans.
   Militant du Parti communiste, il a rejoint en 1941 le Front national de lutte pour l'indépendance de la France dont il est devenu en mars 1943 un des responsables pour la Marne.
   Membres des Francs-tireurs et partisans françis (FTPF) sous le pseudonyme de capitaine Mercier, Il a participé à des transports d’armes destinés aux FTPF-FFI de l’arrondissement d’Épernay placés sous le commandement de Pierre Servagnat et, en juin 1944, à une action de sabotage sur la ligne Paris-Strasbourg au pont de la Croix Billard à Dormans.
   À la Libération, il a été nommé sous-préfet d’Épernay, fonction qu’il a exercé jusqu’à sa démission en octobre 1946.  
   Henri Kinet a été homologué FFI (Forces française de l'intérieur). Il a recu la Croix de guerre 1939-1945 et la Médaille de la Résistance par arrêté du 24 avril 1946 publié au JO du 17 mai 1946.
   Il est décédé le 21 janvier 1984 à Bruyères-et-Monbérault (Aisne), où une rue porte son nom.


Henri Kinet


 

Pierre LABARRE (1909-1944)

   Pierre Labarre est né le 17 février 1909 à Vertus (Marne), son épouse Charlotte Moncuit le 27 juillet 1908 à Bouzy (Marne).   Instituteur à Vinay (Marne), Pierre Labarre a rejoint en juin 1943 avec son épouse Charlotte, le mouvement CDLR (Ceux de la Résistance), et le groupe FFI (Forces françaises de l'intérieur) de Vinay en septembre 1943.
   Il a été arrêté le 17 février 1944 à Vinay et déporté NN le 25 avril 1944 à Natzweiler-Struthof (matricule 12 199). Transféré début septembre 1944 à Dachau puis à Mauthausen, il a été affecté au Kommando de Melk (construction d’une usine souterraine de roulements à billes pour la firme Steyr, Daimler et Puch).
   Il est décédé le 16 novembre 1944 à Mauthausen, date et lieu retenus par le JO du 24 octobre 1993.
   Pierre Labarre a été homologué FFI. Il a reçu à titre posthume le titre de Combattant volontaire de la Résistance, avec la mention DIR (Déporté-Interné-Résistant) et la Médaille de la Résistance par arrêté du 3 février 1960 publié au JO du 10 mars 1960.
   Le nom de Pierre Labarre est inscrit sur le monument aux morts de Vinay, sur le monument aux martyrs de la Résistance du canton de Vertus, et sur la liste des « Déportés » du monument aux martyrs de la Résistance élevé à Épernay.
   À Châlons-en-Champagne, il figure sur la plaque « 1939-1945 » érigée dans l’École normale d'instituteurss, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale d'institutrices, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
   À Reims, son souvenir est conservé dans le Square des victimes de la Gestapo, sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie ».

 

Jean LAMBERT (1898-1968)

   Jean Charles Théodore Lambert est né le 30 septembre 1898 à Dontrien (Marne). Il était le fils de Paul Charles Lambert et de Marie Julia Bacquenois, cultivateurs. Il a épousé Marie Albertine Levêque, fille de cultivateurs le 18 septembre 1920 à Romigny (Marne). Le couple avait deux enfants, Jean et Maurice.
   Directeur de l'École Gerbault à Reims avant-guerre,Jean Lambert militait au sein du SNI (Syndicat national des instituteurs) avec les « Amis de l'École émancipée » et au Parti socialiste SFIO (Section française de l'Internationale ouvrière).
   Déplacé d’office en janvier 1941 à Sainte-Ménehould par le préfet Bousquet, il a été muté à Aougny en octobre 1941.
   En 1942, il a été contacté par Charles Guggiari, responsable départemental de Libération-Nord, qui l'a désigné pour prendre la direction du mouvement dans le secteur de Ville-en-Tardenois, en liaison avec Robert Duterque. Il diffusait des tracts et des journaux clandestins comme Libération zone nord.
   
Au cours de l’été 1942, il a fourni des faux papiers à des réfractaires au STO (Service du travail obligatoire) et il est venu en aide à des juifs rémois avec son fils Jean. Ce dernier, alerté de l’imminence des arrestations par Émile Bouvy, secrétaire de police au commissariat du 2e canton de Reims, a prévenu les familles menacées. Jean Lambert père a organisé en particulier le passage de la ligne de démarcation de Madeleine et Feiga Schumer et de Cécile Zins.
   En décembre 1943-janvier 1944, il a hébergé et caché un aviateur allié amené par son fils Jean.
   Il a participé avec Léo Borgniet à la reconstitution du SNI dans la clandestinité.
   Au printemps 1944, il a constitué un groupe de FFI (Forces françaises de l'intérieur) dans la région de Ville-en-Tardenois, le groupe d'Aougny
   Jean Lambert a participé le 28 août au combat de la Ferme de Chantereine au cours duquel il a failli perdre son fils Maurice.
   Le 26 août 1944, il avait reçu l'ordre de rejoindre la centaine Davoust commandée par Pierre Demarchez au maquis de Champlat, dans laquelle son fils Maurice s'était engagé. C'était la quatrième centaine constituée dans le cadre du Plan Paul déclenché lors du débarquement allié en Normandie. Elle s'était installée dans la Ferme de Chantereine sur le territoire de la commune de Champlat. Jean Lambert avait constaté avec stupeur qu'il n'y avait pas de service de garde autour de la ferme, que l'arrivée de son groupe n'avait même pas été signalée. Il a rédigé un rapport dans lequel il décrivait le grand désordre qui régnait à l'intérieur des bâtiments (matériel antichar resté dans les caisses, notices d'emploi accompagnant les explosifs égarées), et comment au cours de la journée du 27, arrivèrent individuellement ou en petits groupes des hommes et des femmes souvent très jeunes, venus offrir leurs services. L'après-midi, des avions allemands survolèrent le site en rase-mottes ; plusieurs FFI, les prenant pour des avions américains, sortirent de la ferme pour leur faire des signes d'amitié. Malgré les conseils des habitants de Champlat et du médecin-colonel Pourcines, le lieutenant Demarchez refusa de donner l'ordre d'évacuer la ferme. Le 28 août, peu après qu'un avion suspect balançant les ailes ait à nouveau survolé la ferme de Chantereine, celle-ci fut encerclée par plusieurs chars allemands et attaquée par surprise. Cette attaque provoqua la sortie précipitée sans ordre et sans armes de la plupart des occupants de la ferme qui s'enfuirent vers la forêt à travers les champs moissonnés, donc à découvert. Le plus jeune des onze FFI tués à la Ferme de Chantereine, Philippe Coutiez, n'avait que 17 ans.
   En août 1945, entendu sur commission rogatoire par le juge d’instruction de la Haute Cour de Justice, il a relaté son entrevue à Châlons avec le préfet Bousquet, qui a déclaré avoir pris la mesure de déplacement d’office de 1941 pour lui éviter d’être interné, les autorités d’occupation l’ayant signalé comme communiste.   
   En octobre 1945, il a été désigné pour représenter la CGT au sein du conseil de gérance de L’Union, journal issu de la Résistance devenu l’organe du CDLN (Comité départemental de libération nationale).
   Jean Lambert a été homologué FFI et a reçu le titre de Combattant volontaire de la Résistance.
   Jean Lambert est décédé le 17 juin 1968 à Reims (Marne).


Jean Lambert

 

Yvette LUNDY (1916-2019) - La famille Lundy, une famille de résistants

   Yvette Lundy est née dans la Marne pendant la 1ère guerre mondiale le 22 avril 1916 à Oger, où sa famille originaire de Beine au Nord de Reims s'était repliée. Institutrice à Gionges, elle avait quatre frères et deux sœurs qui ont tous participé activement à la Résistance.
   Après la démobilisation et le retour d’exode des uns et des autres à la fin de l’été 1940, chacun a retrouvé son activité :
- Yvette a repris son poste d’institutrice et de secrétaire de mairie à Gionges ;
- René, né en 1897, tenait un atelier de bonneterie à Beine avec son épouse Yvonne ;
- Lucien, né en 1901, était cafetier-épicier à Aussonce dans les Ardennes, aux confins de la Marne ;
- Georges, né en 1903, exploitait la ferme familiale à Beine ;
- Berthe, née en 1910, qui se destinait à exercer le métier de couturière, secondait Georges à la ferme.
   Dès le retour d’exode à Beine, René, Georges et Berthe ont aidé des prisonniers de guerre évadés du camp de prisonniers établi près de Bazancourt. René utilisait sa voiture à cheval pour les transporter jusqu’à Reims où ils étaient pris en charge par la Croix Rouge. Georges, président du Comité d’aide aux prisonniers de Beine, se montra très actif pour obtenir le maximum de rapatriements. À l’automne 1941, Berthe a accompagné deux prisonniers tunisiens évadés, leur a fait passer la ligne de démarcation en franchissant avec eux le Cher à gué, ce qui lui a valu le surnom de « Poule d’eau ».
   Georges a récupèré des armes abandonnées par l’armée française en mai-juin 1940 et a commencé à constituer des caches d’armes. Il repérait des terrains d’atterrissage pour le BOA (Bureau des opérations aériennes de la France libre). En juin 1943, il a rejoint le Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France. Il a organisé avec Serge Pigny de CDLR (Ceux de la Résistance) des sabotages sur le canal de l’Aisne à la Marne, sur les voies ferrées près de Sillery, sur des lignes électriques et à la distillerie de Bétheniville.
   René, agent occasionnel de Résistance Fer à partir d’octobre 1943, transportait des armes, des munitions et des explosifs qu’il cachait chez lui. Il y a dissimulé aussi des postes récepteurs et un poste émetteur radio. Engagé dans la centaine FFI Duriez, il a entreposé chez lui du ravitaillement pour les FFI qui participèrent à partir de juin 1944 aux actions du Plan Paul.
   Les Lundy de Beine ont hébergé en mai 1943 un aviateur de la RAF, puis en décembre 1943 plusieurs membres d’équipages alliés pris en charge par le réseau d’évasion Possum.
   À Gionges, Yvette utilisait sa fonction de secrétaire de mairie pour fournir des papiers d’identité et des cartes d’alimentation à des prisonniers évadés du camp de Bazancourt pris en charge par ses frères de Beine, à des réfractaires au STO et, à la demande d’une amie modiste, à une famille juive de Paris. En contact avec Henri Coquart et Serge Pigny, elle a pris en charge des réfractaires au STO (Service du travail obligatoire), le temps de leur trouver une filière. Elle n’a pas hésité à héberger des résistants traqués dont le jeune communiste Marcel Nautré, des membres d’équipages alliés pris en charge par le réseau Possum, des Français libres parachutés pour une mission en France qui lui ont été confiés pour quelques jours par l’agent de liaison du BOA Robert Peltier, pseudo « Petit Claude ».
   À Aussonce, Lucien était tout aussi actif. Son café-auberge servait de refuge à des prisonniers évadés. En mai 1942, il a été contacté par le docteur Lefrançois de Charleville, médecin-major au 29e Régiment d'infanterie où il avait été mobilisé en 1939, et il a accepté d’accueillir deux aviateurs britanniques rescapés d’un crash à Aiglemont qu’il a hébergés pendant plus de trois mois. Ces aviateurs ont été ensuite pris en charge par le réseau Confrérie-Notre-Dame-Castille dont Lucien Lundy est devenu un agent. Son café-auberge faisait aussi partie des gîtes utilisés par le réseau d’évasion Possum.
   En dehors de la Marne, deux autres frère et sœur ne restaient pas inactifs : André, né en 1907, qui résidait en Aveyron où il était responsable de la station électrique de Verlhaguet près de Montauban, hébergeait des réfractaires au STO (Service du travail obligatoire) et a rejoint un groupe de FFI (Forces françaises de l'intérieur) dans le Tarn-et-Garonne ; Marguerite, née en 1912, et son mari Émile, ambulanciers à Villemonble dans la région parisienne, transportaient des clandestins dans leur ambulance.
   Berthe a été arrêtée par la Feldgendarmerie le 8 décembre 1942 à Beine. Accusée d’avoir caché dans des cigarettes envoyées à des prisonniers de guerre en Allemagne des messages d’encouragement et des renseignements militaires, elle a été condamnée le 13 février 1943 par le tribunal militaire allemand de Châlons-sur-Marne à 30 mois de prison. Déportée en Allemagne le 19 juillet 1943, elle a été incarcérée successivement dans les prisons de Trèves, de Gotteszell et de Wittlich. Elle a tenté à plusieurs reprises de s’évader. Elle a finalement été libérée en juillet 1944. De retour en France, elle a appris les arrestations d’Yvette, de Georges et de Lucien et, malgré un état de santé altéré, elle a repris son action dans le secteur de Beine.
   Yvette a été arrêtée le 19 juin 1944 à Gionges. Lors des interrogatoires, elle a fait croire qu’elle était fille unique pour protéger ses frères. Incarcérée à Châlons-sur-Marne, puis au Fort de Romainville, elle a été déportée le 18 juillet 1944 à Sarrebruck Neue Bremm, puis à Ravensbrück (matricule 47 360). Elle a été affectée le 16 novembre 1944 sous le matricule 15 208 dans un kommando de Buchenwald, celui de Schlieben, où les déportées travaillaient à la fabrication d’armes antichars pour la firme Hasag. Elle a été libérée le 21 avril 1945 par l’Armée rouge et a rejoint les lignes américaines à Torgaü. Rapatriée par avion le 18 mai 1945, elle a été accueillie à l’Hôtel Lutetia où Berthe était venue la chercher.
   Quant à Georges et Lucien, ils ont été arrêtés par la Gestapo de Reims le 18 juillet 1944, jour de la déportation d’Yvette, Georges à Beine, Lucien à Aussonce. Après l’interrogatoire au siège de la Gestapo où Georges a été torturé, tous deux ont été incarcérés dans les prisons de Reims puis de Châlons-sur-Marne où Berthe a réussi à leur faire savoir qu’elle était rentrée en France. Georges et Lucien ont été déportés le 19 août 1944 à Natzweiler-Struthof où ils ont reçu respectivement les matricules 22 816 et 22 817, puis ils ont été transférés à Dachau début septembre 1944. Leurs routes se sont alors séparées. Georges est décédé le 13 mars 1945 à Schörzingen, un Kommando de Natzweiler, date et lieu retenus par le JO du 11 janvier 2009.
   Quant à Lucien qui s’était fait inscrire comme charcutier-cuisinier, il a été transféré en novembre 1944 à Auschwitz (matricule 200 071). Le 18 janvier 1945, devant l’avance de l’Armée rouge, Auschwitz a été évacué et Lucien Lundy a subi une atroce « marche de la mort » vers Gross-Rosen, à laquelle il a survécu grâce à l’aide de quelques camarades. Le 9 février 1945, il a fait partie d’un convoi vers Buchenwald puis vers Mauthausen (matricule 129 876), où un déporté espagnol est parvenu à le placer au revier du camp et où la Croix-Rouge l'a libéré comme grand malade le 28 avril 1945. Il est rentré en France le 13 mai 1945. Le 22 septembre 1945, il a fait partie du peloton d’exécution de Roland Jeunet, agent de la Gestapo originaire de Fismes, responsable de l’arrestation de nombreux patriotes, en particulier de résistants qui s’étaient mis au service du réseau d’évasion Possum, qui a été condamné à mort par le tribunal militaire de Châlons-sur-Marne.    
    À Beine-Nauroy, où une rue porte son nom, Georges Lundy figure sur le monument aux morts avec la mention « chef de trentaine FFI ».
   La famille a été très éprouvée par la mort en déportation de Georges mais elle a poursuivi ses engagements. René a été maire de Beine de la libération à 1947, puis conseiller général. Yvette, très active au sein des associations de résistants déportés, UNADIF (Union nationale des associations de déportés et internés de la Résistance et familles de disparus) et CVR (Combattants volontaires de la Résistance), s’est beaucoup impliquée dans le Concours national de la Résistance et de la Déportation et elle a témoigné inlassablement auprès des collégiens et lycéens.
   Le collège Les Bleuets d’Aÿ-Champagne porte depuis 2011 le nom d’Yvette Lundy. La cérémonie de changement de nom s’est déroulée le 14 octobre 2011 en sa présence.
   Yvette Lundy a entrepris d’écrire ses mémoires avec la collaboration de Laurence Boisson-Barbarot, mémoires publiés sous le titre Le Fil de l’araignée. Itinéraire d’une résistante déportée marnaise.    L’ouvrage a été officiellement présenté le 7 décembre 2011 dans les salons de l’Hôtel de Ville d’Épernay.
   En 2016, le centenaire d'Yvette Lundy a été célébré en différents lieux du département de la Marne. Un « Jardin Yvette Lundy » a été inauguré le 27 avril à Oger où elle est née. Le 12 mai, un Livre d'or lui a été remis à Aÿ-Champagne par les enseignants et les élèves du collège qui porte son nom. Le 29 mai, elle a reçu la Médaille de la Ville d'Épernay où elle résidait. Le 2 juin, elle a été reçue dans la salle de classe de l'école de Gionges où elle a été arrêtée le 19 juin 1944, devenue salle du conseil municipal baptisée en 2012 « Salle Yvette Lundy ». Michel Hanquet, le maire de Gionges, et plusieurs de ses anciens élèves lui ont rendu hommage en lui remettant un brevet de citoyenne d'honneur et la médaille de la Commune. La place de la mairie a été rebaptisée « Place Yvette Lundy ». Le 20 juin, c'est la commune de Beine-Nauroy, berceau de la famille Lundy, qui lui a rendu hommage en donnant les noms de Georges et Yvette Lundy à la Bibliothèque municipale.
   Yvette Lundy est décédée le 3 novembre 2019.
   Georges, Lucien, René et Yvette Lundy ont reçu le titre de Combattants volontaires de la Résistance, avec la mention FFC (Forces françaises combattantes) pour René, la mention DIR (Déporté Interné Résistant) pour Georges, Lucien et Yvette. La Médaille de la Résistance a été décernée à Berthe par l'arrêté du 15 octobre 1945 publié au JO du 20 octobre 1945, à Georges par l'arrêté du 7 janvier 1955 publié au JO le 13 janvier 1955, à Lucien par l'arrêté du 6 septembre 1945 publié au JO du 12 septembre 1945, et à Yvette par l'arrêté du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946.

 


Yvette Lundy, déportée à Ravensbrück
transférée à Buchenwald-Kommando de Schlieben
Matricule 47360
(1916-2019)

 

Sigismond MOSZKOWSKI (1887-1944)

   Sigismond Oscar Moszkowski est né le 12 février 1887 à Svochowitza (Sosnovice) en Pologne. Issu d’une famille de propriétaires terriens de la région de Kielce sous administration russe, il s’est engagé très jeune contre le régime tsariste. Renvoyé de son collège, il est passé en Autriche où il a terminé ses études secondaires avant de venir à Paris suivre des études supérieures de mathématiques.
   Engagé dans la Légion étrangère pendant la 1ère guerre mondiale au cours de laquelle il a perdu un bras, il a été naturalisé français en 1916.
   Professeur de mathématiques et militant socialiste à Perpignan, il a représenté en 1920 la Fédération socialiste des Pyrénées-Orientales au Congrès de Tours qui a donné naissance au Parti communiste. Il a fondé et organisé le PCF dans ce département. Muté d’office dans le Calvados, il a quitté un temps l’enseignement. En 1924, il a obtenu un poste au Collège de Châlons-sur-Marne où il a repris son activité syndicale et politique. Considéré par les Renseignements généraux comme un « propagandiste communiste ardent », il a été dès son arrivée à Châlons inscrit au Carnet B (liste des étrangers suspects), rayé en juillet 1929, et inscrit à nouveau en juillet 1932.    Responsable du Syndicat des professeurs et de la section châlonnaise du PCF, il a été un fervent partisan de l’unité syndicale et politique et du Rassemblement populaire. Malgré l’échec du Front populaire, il est parvenu à créer en 1938 avec les socialistes châlonnais Irénée Dlévaque et Lucien Draveny une éphémère « section unique de la classe ouvrière » qui a été condamnée et rejetée par la Fédération marnaise du Parti socialiste.
   En septembre 1939, à la déclaration de guerre, Sigismond Moszkowski a été écarté de son poste au Collège de Châlons-sur-Marne contre l’avis de l’Inspecteur d’académie, Jules Heller, et son domicile a été perquisitionné.
   En mai 1940, il a été arrêté et assigné à résidence par arrêté préfectoral, conduit au « centre de concentration provisoire de l’Hôtel-Dieu » à Châlons, puis acheminé au camp de Chibron à Signes dans le Var, camp où il a retrouvé Albert Dagonet, un viticulteur communiste de Boursault. Après la fermeture de ce camp en février 1941, il a été transféré à Fort-Barraux dans l’Isère, puis dans un bagne du sud de l’Algérie. D’anciens collègues châlonnais, en particulier Irénée Dlévaque, ont continué de correspondre avec lui, et l’aumônier du collège, Jean-Marie Graser, a obtenu sa libération. Ramené en métropole, il est resté exclu de l’enseignement et s’est installé à Digne où il a retrouvé son épouse et a pris contact avec la résistance.
   Le 24 janvier 1944, Sigismond Moszkowski a été arrêté à Digne pour sabotage. Considéré comme juif, il a été interné à Drancy et déporté le 10 février 1944 par le convoi  68 à Auschwitz où il il a été gazé à l’arrivée. Le JO du 14 décembre 1997 retient comme date de son décès le 15 février 1944.
   Sigismond Moszkowski a été homologué FFI (Forces françaises de l'intérieur) et DIR (Déporté-Interné-Résistant). La Médaille de la Résistance lui a été décernée à titre posthume par arrêté du 7 novembre 1958, publié au JO du 3 décembre 1958, ainsi que la Légion d'honneur.
   À Châlons-en-Champagne, une plaque commémorative apposée dans la salle des professeurs du lycée Pierre Bayen honore sa mémoire.
   À Reims, dans le Square des victimes de la Gestapo, le nom de Sigismond Moszkowski est inscrit sur la plaque commémorative qui honotre la mémoire des « Maîtres de l'École laïque victimes de la barbarie nazie ».

 

Thérèse PIERRE (1908-1943), pseudonyme dans la Résistance : Madeleine


 

   Née le 5 novembre 1908 à Épernay (Marne), morte sous la torture le 26 octobre 1943 à Rennes (Ille-et-Vilaine) ; professeure ; militante syndicaliste CGT et communiste ; résistante ; Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France ; FTPF.
   Thérèse Pierre était la fille de René Ernest Pierre et d’Aline Catherine Francine Amiel, un couple d’instituteurs domiciliés à Épernay (Marne).
   Ancienne élève de l’École normale d’institutrices de Châlons-sur-Marne (Châlons-en-Champagne, Marne) de 1924 à 1927, puis de celle de Nancy (Meurthe-et-Moselle), où elle a préparé le concours d’entrée à l’École normale supérieure de Fontenay auquel elle a échoué, Thérèse Pierre a occupé son premier poste d’enseignante à la rentrée 1929 à Feltin (Creuse) comme surveillante.
   Après un second échec au concours d’entrée à Fontenay, elle a été nommée professeure à l’École primaire supérieure de Bar-le-Duc (Meuse) en octobre 1934. Militante communiste, elle s’est rendue en 1935 en URSS avec sa compagne Emma, et a organisé dès 1936 des collectes en faveur des Républicains espagnols. Membre du Syndicat du personnel de l’enseignement secondaire, elle animait en outre la section locale du Comité de liaison des Auberges de jeunesse (AJ). À ce titre, elle a fait un rapport sur les AJ au congrès de l’Union départementale de la Confédération du travail (UD-CGT) de la Meuse en juillet 1938. Elle militait activement pour l’intervention aux côtés de l’Espagne républicaine. Membre de la section communiste de Bar-le-Duc, elle a été déléguée à la conférence nationale du Parti communiste à Gennevilliers en janvier 1939. Elle était également responsable du Comité des Femmes contre la guerre et le fascisme de Bar-le-Duc, qui fit paraître de 1937 à 1939 un bulletin mensuel, Femmes de la Meuse. Trésorière de la Ligue des Combattants de la Paix, elle a pris la parole le 11 novembre 1938 à Verdun (Meuse) dans un meeting de femmes pacifistes.
   En septembre 1939, après une perquisition effectuée à son domicile, elle a été expulsée de la zone des combats de la 3e Armée et déplacée d’office en Bretagne où elle a exercé les fonctions de professeure de sciences naturelles dans les Écoles primaires supérieures de Vitré, puis de Redon (Ille-et-Villaine) en 1940, et de Carhaix (Finistère) en 1941. Elle y a fait la connaissance d’un responsable du Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France, Yvon, futur colonel Pascal dans la Résistance, qui lui a demandé d’implanter le Front national en Ille-et-Villaine. À la rentrée 1942, elle a été mutée à l’école primaire supérieure de jeunes filles de Fougères (Ille-et-Vilaine), où elle est devenue rapidement responsable du Front national pour l’arrondissement sous le pseudo de « Madeleine ». Elle était chargée plus particulièrement de la rédaction et de la diffusion de la presse clandestine. Par ailleurs elle délivrait des faux papiers à des clandestins, en hébergeait occasionnellement chez elle, servait d’agent de liaison, participait à des transports d’armes et à la préparation de plusieurs opérations contre l’occupant au sein des Francs-tireurs et partisans français (FTPF).
   Arrêtée par la Gestapo le 21 octobre 1943 à Fougères, elle a été incarcérée à la prison Jacques Cartier de Rennes (Ille-et-Vilaine) où elle a été affreusement torturée par des policiers français du Service de la police anticommuniste venus de Paris. Ramenée dans sa cellule, le corps brisé, elle a eu la force de communiquer avec ses voisines de cellule répétant inlassablement : « Je ne parlerai pas... Ils ne me feront pas parler… Ils n’ont rien obtenu de moi ».
   Le 26 octobre elle a été retrouvée pendue au barreau de sa cellule, mise en scène de ses bourreaux pour faire croire à un suicide, selon le témoignage du commandant FTPF Pétri. La Résistance a diffusé un tract annonçant son décès :
   « ENCORE UN CRIME MONSTRUEUX DES BOCHES.
Le jeudi 21 octobre, veille de l’anniversaire du massacre de Chateaubriant, la Gestapo arrêtait à FOUGÈRES, Mlle Thérèse PIERRE professeur à l’E.P.S. de cette ville. Son crime était d’être restée fidèle à son idéal communiste et de trop aimer sa patrie pour la libération de laquelle, en bonne française, elle combattait. Tous les Fougerais connaissaient Thérèse PIERRE pour son dévouement, sa simplicité et son impartialité dans son travail.
Malgré cela, la Gestapo l’arrêta et la transféra à la prison de Rennes où les boches lui firent subir les pires tortures : elle fut battue sauvagement à la tête, aux jambes, sur tout le corps, à tel point qu’elle dut se traîner à terre pour regagner sa cellule où le lendemain, elle fut retrouvée morte. C’est alors que les assassins tentèrent de camoufler leur crime en répandant la version que Thérèse PIERRE se serait suicidée.
ASSEZ DE CRIMES !
FRANÇAIS, FRANÇAISES !
Vous pouvez et vous devez venger Thérèse PIERRE.
Vous pouvez et vous devez empêcher que se poursuivent les assassinats de patriotes français. »
   Le corps de Thérèse Pierre a été inhumé dans le cimetière de l’Est de Rennes, puis il a été transféré en 1946 dans le cimetière du Nord à Épernay (Marne).
   L’acte de décès numéro 2070, dressé le 28 octobre 1943 à l’état civil de Rennes, déclare que son décès « paraissant remonter à quelques heures  a été constaté le 26 octobre 1943 à dix-heures et demie, et que le corps a été retrouvé 56 Boulevard Jacques Cartier ».
   La mention marginale « Morte pour la France le 26 octobre 1944 à Rennes (Ille et Vilaine) » a été ajoutée à son acte de naissance le 17 décembre 1945 à l’état civil d’Épernay.
   Thérèse Pierre a été homologuée RIF (Résistance intérieure française) et DIR (Déportée-Internée-Résistante). Elle a reçu à titre posthume la Croix de guerre avec étoile d’argent et une citation à l’ordre de la Division en 1945, la Médaille de de la Résistance avec rosette par décret du 10 janvier 1947 publié au JO le 11 janvier 1947 et la Légion d'honneur en 1958.
   À Fougères en Bretagne, une plaque apposée après la guerre à l’entrée de l’École primaire supérieure où elle enseignait honore sa mémoire, et son nom a été donné à un collège de la ville créé en 1973.
   Dans la Marne, une plaque commémorative a été apposée à l’École normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne, aujourd’hui Châlons-en-Champagne. Cette plaque qui avait disparu a été remise en place dans les locaux de l’ancienne École normale de filles, devenue aujourd’hui l’École supérieure du professorat et de l’éducation (ESPÉ). En 2007, une nouvelle plaque honorant la mémoire de Thérèse Pierre a été inaugurée dans le hall de cette école.
Le nom de Thérèse Pierre est également inscrit sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » conservée dans le Square des victimes de la Gestapo à Reims. Il figure aussi sur la liste des internés du Monument aux martyrs de la Résistance à Épernay
   Dans la Meuse, une école primaire de Bar-le-Duc porte le nom de Thérèse Pierre.


Thérèse Pierre

 

Raymond SIROT (1901-1944)

   Raymond Eusèbe Alexis Sirot est né le 11 décembre 1901 à Courcy (Marne).
   Mobilisé en 1939, Raymond Sirot, père de trois enfants, a repris son poste d'instituteur à Gueux (Marne) en août 1940. Secrétaire de mairie, il a organisé avec son épouse un comité d’aide aux prisonniers de sa commune. Il a rejoint le réseau Hector et il a fait partie de l’équipe CDLR-BOA (Ceux de la Résistance-Bureau des opérations aériennes de la France libre) dirigée par Pol Poncelet, qui était chargée de repérer des terrains de parachutage susceptibles d'être homologués par la RAF (Royal Air Force), d'assurer la réception des containers et leur transport jusqu'à des caches et des dépôts d'armes. Avec son jeune fils Jean, il a caché et ravitaillé les résistants recherchés par la Gestapo, et il leur a fourni des faux-papiers.
   Arrêté le 28 décembre 1943 avec Pol Poncelet et quatre autres camarades, Raymond Sirot a été incarcéré à Reims, interné à Compiègne et déporté comme résistant le 22 janvier 1944 à Buchenwald (matricule 41 597), où il est décédé le 16 mars 1944 selon le Livre-Mémorial des déportés de France. Le JO du 16 février 2003 fixe son décès au 18 mars 1944, date reprise dans le Bulletin municipal de Gueux, Les Gauseries.
   Raymond Sirot a été homologué FFC (Forces françaises combattantes). Il a reçu à titre posthume la Médaille de la Résistance par arrêté du 3 juillet 1946 publié au JO du 11 juillet 1946, et le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention DIR (Déporté-Interné-Résistant).
   À Gueux, une plaque commémorative a été apposée après la guerre sur la maison qu’occupait Raymond Sirot. Son nom, qui figure sur le monument aux héros de la Résistance de Gueux-Vrigny, a été donné à une rue et au collège de la commune.
   À Reims, son nom est inscrit sur la plaque qui rend hommage aux « Maîtres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » apposée dans le Square des victimes de la Gestapo.
   À Châlons-en-Champagne, son nom est inscrit sur la plaque 1939-1945 érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale d'institutrices, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
   Après la guerre, son fils Jean Sirot a effectué de longues recherches sur l’activité du BOA dans la Marne en relation avec André Aubert, correspondant départemental du Comité d’histoire de la 2e guerre mondiale. Il a échangé une importante correspondance avec Michel Pichard, ancien responsable national du BOA.

 

André THOMAS (1915-1944), pseudonyme dans la Résistance : André

   

   Né le 27 janvier 1915 à Bouy-Luxembourg (Aube), mort en action le 28 août 1944 à Champlat (Marne) ; instituteur ; FFI.
    André Marcel Thomas était le fils de Camille Gaston Thomas, cultivateur, et d’Alphonsine Augustine Petitjean, sans profession.
    Il a épousé épousa Rosalie Marie Jockmans le 25 août 1935 à Cerilly (Yonne).   
   Prisonnier de guerre libéré en juin 1941 pour raisons de santé, André Thomas exerçait la profession d'instituteur à Saint-Gilles (Marne).
   Il a rejoint la centaine FFI (Forces françaises de l'intérieur) Davoust, quatrième centaine constituée dans la Marne dans le cadre du Plan Paul, qui tenait le maquis de Champlat
   Il a été tué le 28 août 1944 lord de l’attaque de la Ferme de Chantereine par des blindés allemands.   
   Il est inhumé à Reims dans le cimetière du Faubourg de Laon.
   André Thomas a obtenu la mention « Mort pour la France » et le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention FFI.
   À Champlat-Boujacourt, son nom est gravé sur le monument de la Ferme de Chantereine.
   Il figure avec celui de son camarade Georges Paté sur le monument aux morts de Saint-Gilles.
   À Reims, son souvenir est conservé dans le Square des victimes de la Gestapo, sur la plaque dédiée « Aux maîtres de l’école laïque victime de la barbarie nazie ».


André Thomas


Paul TREUIL (1897-1976), pseudonyme dans la Résistance : Pol

   Paul Jacques Maurice Treuil est né le 24 septembre à Reims (Marne).
   Militant du Parti socailiste SFIO (Section française de l'Internationale ouvrière), instituteur dans la Marne à Clesle, puis à Verzenay avant-guerre, il a rejoint la résistance et a participé à la recontitution dans la clandestinté du Syndicat national des instituteurs (SNI).
   Il a été homologué FFI (Forces françaises de l'intérieur).
   Il est décédé le 14 août 1976 à Baye (Marne).


Paul Treuil

 

Alfred UNTEREINER, en religion Frère Joseph BIRIN (1906-1968)

 

    Alfred Untereiner est né le 24 juin 1906 à Veckersviller (Moselle annexée).
   Frère des Écoles chrétiennes, en religion Frère Joseph Birin, il dirigeait depuis 1932 l’école Saint-Victor d'Épernay, école privée catholique gratuite financée par le mécénat de la maison de champagne Moët-et-Chandon. Au cours de l'année 1943, il a été à l’initiative de la constitution du groupe Ceux de la Libération (CDLL) d’Épernay et il en a confié la direction à Robert de Vogüé, PDG de Moët-et-Chandon. Il était aussi membre du réseau de renseignement Eleuthère sous le code RAE 432, aux côtés d’Henri Fignerol et de Maurice Germain. Il a aidé des prisonniers de guerre évadés et des jeunes qui voulaient se soustraire au STO (Service du travail obligatoire), leur a fourni des faux papiers et leu a trouvé des refuges.
   En novembre-décembre 1943, la résistance sparnacienne a été décimée par des arrestations en chaîne. Le 15 décembre 1943, Frère Birin a été arrêté par la Gestapo dans sa salle de classe à Épernay. Incarcéré à Châlons-sur-Marne jusqu’au 18 janvier 1944, il a été transféré à Compiègne et déporté le 27 janvier 1944 à Buchenwald (matricule 43 652). Au cours du transport, en représailles après neuf évasions entre Châlons-sur-Marne et Vitry-le-François, neuf jeunes de son wagon ont été fusillés et les autres entassés nus dans le wagon. Le 13 mars 1944, il a été transféré à Dora où il a caché qu'il était ecclésiastique, s'est déclaré instituteur, et a réussi à se faire affecter à l’Arbeitsstatistk comme secrétaire et comme interprète. Dans cette fonction, il s’est efforcé de soustraire ses camarades aux kommandos les plus meurtriers. Le 4 novembre 1944, accusé de protéger ses camarades, il a été conduit avec Paul Chandon à la prison de Nordhausen, puis pendant plus de cinq mois au bunker de Dora où il a subi plusieurs interrogatoires et a échappé de peu à une pendaison. Lors de l'évacuation du camp le 4 avril vers Bergen-Belsen, il a survécu à la « marche de la mort » grâce à l’aide de Paul Chandon qui l'a porté sur son dos. Il a été libéré par les Britanniques le 15 avril 1945 à Bergen-Belsen et il est rentré en France le 1er mai 1945.
   Après la guerre, il a témoigné dans un ouvrage publié en 1946 sous le titre 16 mois de Bagne Buchenwald-Dora par le numéro 43 652, ouvrage dont la vente contribua à financer le monument aux déportés élevé en 1950 à son initiative et celle de Paul Chandon près de l’église Saint Pierre-Saint Paul d’Épernay.
   Alfred Unrereiner a été homologué FFC (Forces françaises combattantes), FFI (Forces françaises de l'intérieur). Il a reçu le titre de Combattant volontaire de la Résistance, mention DIR (Déporté-Interné-Résistant) et la Médaille de la Résistance par arrêté du 25 avril 1946 publié au JO du 17 mai 1946, ainsi que la .Légion d'honneur. En 1961, il a été élevé au grade de commandeur de la Légion d'honneur.
   Il est décédé le 13 décembre 1968.
   En 1970, la ville d'Épernay a donné le nom de Frère Birin à un square qui a été ultérieurement rasé pour y construire des logements. L'Allée des Maronniers située à proximité a été rebaptisée en 2011 « Allée Frère Birin ».
  Son nom figure aussi sur une plaque commémorative à l’intérieur de l’église de Veckersviller.


" Frère Birin "
Dossier mis en ligne par Grégory de Gostowski
Service éducatif des Archives municipales d'Épernay

 

André WATIER (1901-1944)


    Né le 7 février 1901 à Chigny-les-Roses (Marne), exécuté sommairement le 27 août 1944 à Verzenay (Marne) ; enseignant ; résistant ; RIF ; CDLR.
   André Watier était le fils d’Albert Augustin Watier et de Philomène Leleu, vignerons à Chigny-les-Roses. Il avait épousé Fernande Derobert et le couple avait cinq filles nées en 1924, 1929, 1932, 1935 et 1940. Domicilié à Ludes (Marne), André Watier a été instituteur, puis professeur, d’abord à l’École professionnelle puis au Collège moderne et technique de la rue Jolicœur à Reims. Il enseignait aussi à l’École supérieure de commerce et il était chef de travaux à l’École de médecine de Reims.
   Capitaine de réserve, André Watier était à la tête du groupe Ceux de la Résistance (CDLR) de Ludes.
   Selon la fiche du COSOR (Comité des œuvres sociales des organisations de Résistance) remplie par son épouse Fernande, il a été arrêté à son domicile le 24 août 1944.
   René Lentremy, un ancien milicien français passé au service des Allemands et arrêté à Paris en novembre 1944, a avoué avoir participé à l’arrestation d’André Watier qu’il situait le 25 août, et à son exécution le 27 août 1944 dans le secteur de la Ferme de l’Espérance située au bord de la route nationale 44 près du bourg de Beaumont-sur-Vesle, mais sur le territoire de la commune de Verzenay :
« Dans la soirée ce fut le tour du capitaine Watier emmené à quelques pas de la ferme, mais dans le sens opposé à l’endroit où avait eu lieu l’exécution de Waïda [exécuté le même jour à l’aube]. Alors que mes camarades français se tenaient sur la route pour empêcher les curieux d’approcher, je suis resté à l’arrière de la voiture en compagnie des Allemands. À l’arrière de la voiture se trouvait Watier ayant en vis-à-vis le soldat allemand et moi-même. Nous avons pris un chemin de traverse et, au moment où la voiture ralentissait, Watier ouvrit brusquement la portière de la voiture et empoigna ensuite le canon de l’arme que l’Allemand et moi avions entre les genoux. Dès qu’il fut en dehors de la voiture, je descendis du véhicule en même temps que l’Allemand et lui tirai une rafale de mitraillette dans le dos. Watier s’est écroulé, tué net, avant que l’Allemand ait eu le temps de se servir de son arme. Aidé par les deux Allemands, nous avons jeté le corps de Watier dans un fossé et nous l’avons recouvert de branchages ».
   Le corps d'André Watier n’a jamais été retrouvé. Sa carte du COSOR le déclare « présumé mort le 26 août 1944 aux environs de Sillery ».
   L’acte de décès d’André Watier, dressé le 11 décembre 1947 par l’officier de l’état civil au ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre et transcrit en mairie de Ludes le 22 décembre 1947, le déclare « décédé le 26 août 1944 à Ludes », sans évoquer les circonstances de sa mort. C’est la date qui est également mentionnée en marge de son acte de naissance à l’état civil de Chigny-les-Roses. Après la disparition d’André Watier, cet acte de décès permettait à ses ayant-droit de bénéficier de l’aide apportée par le ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre aux familles de fusillés-exécutés-morts en action ou en déportation.
   André Watier a été homologué RIF (Résistance intérieure française) au titre de CDLR (Ceux de la Résistance). Le titre d’Interné-Résistant lui a été décerné ainsi que la Médaille de la Résistance par décret du 26 juin 1956 publié au JO le 4 juillet 1956 et la Légion d'honneur en 1958.
   Dans la Marne, le nom d’André Watier est inscrit sur le monument aux morts de Ludes avec la mention « Déporté ».
   À Reims, il figure sur la plaque dédiée « Aux Maitres de l’école laïque victimes de la barbarie nazie » dans le Square des victimes de la Gestapo, sur la plaque « 1939-1945 » de l’Hôtel de Ville, et sur une plaque commémorative apposée dans la cour du lycée Roosevelt.
   À Châlons-en-Champagne, son nom est inscrit sur la plaque « 1939-1945 » érigée dans l’École normale d'instituteurs, qui a été transférée ultérieurement dans la cour d’honneur de l‘École normale d'institutrices, devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ).
   Le 29 janvier 1946, René Lentremy a été condamné à mort par la Cour de Justice de la Marne pour atteinte à la sûreté intérieure de l’État et intelligence avec l’ennemi, peine commuée le 20 mars 1946 en travaux forcés à perpétuité, et le 29 juin 1950 en 20 ans de travaux forcés. Le 4 octobre 1953, incarcéré depuis 48 heures dans la prison d’Eysses à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), il est parvenu à s’évader à la faveur d’une corvée extérieure et a été repris. Suite à plusieurs autres remises de peine, il a été libéré le 22 janvier 1960. Il avait alors 37 ans.



André Wattier

 

Les enseignants et la presse clandestine

   Les enseignants ont joué un rôle spécifique dans la presse clandestine. Comme d’autres résistants ils ont diffusé des tracts et journaux clandestins le plus souvent acheminés depuis Paris. Mais, en 1944, ils ont aussi participé à la création de feuilles clandestines marnaises. Robert DUTERQUE a fait partie du comité de rédaction du premier numéro de L’Union « Organe officiel du Comité départemental de la libération de la Marne », qui a été diffusé à Reims en mai 1944. À la même date, était rédigé le premier numéro de La Marne enseignante, organe du Syndicat national des instituteurs (SNI) qui avait été reconstitué dans la clandestinité par André AUBERT, Pierre BARBIER, Léon BORGNIET, Robert DUTERQUE et Jean HUE. Pierre BARBIER a aussi participé à la création des Fils de Valmy, organe du Front national de lutte pour l’indépendance de la France.

 

 

De nombreux lieux de mémoire dédiés aux enseignants victimes de la répression nazie

À Reims

       
   À Reims, dans le Square des victimes de la Gestapo 18, rue Jeanne d'Arc, une plaque porte l'inscriptiuon : « Honneur à tous les Maîtres de l'école laïque victimes de la barbarie nazie tombés pour la défense de la Liberté - Honneur à nos héros marnais - Cette plaque a été apposée le 7 juillet 1946 Journée de l'école laïque par les bons soins de l'Éducation nationale » initialement érigée à la Bourse du travail, boulevard de la Paix, cette plaque avait été transférée rue du président Franklin Roosevelt, dans le hall d’entrée conduisant à la Salle de Reddition. Lorsqu’en 1985 le site a été classé et transformé en Musée de la Reddition, elle a été déposée et transférée dans le Square des victimes de la Gestapo.

   - ALLIN Albert [Jean], instituteur à l’École Jean Macé à Reims, FFI appartenant au groupe de Sézanne, mort des suites de ses blessures le 30 août 1944.
   - 
BARBIER Pierre, instituteur révoqué par le gouvernement de Vichy, résistant, déporté le 15 juillet 1944 à Neuengamme, Kommando de Husum-Schwesingen, mort en déportation le 15 février 1945.
   - M
ME BARILLON-CHARBONNIER [Jeanne], directrice de l'École de L'Épine, résistante, déportée en juin 1944 à Sarrebruck Neue Breme puis à Ravensbrück, morte en déportation le 6 février 1944.
   - 
BEUILLER Raymond ?
   - 
BONNET Maurice ?
   - 
CAURIER René, prisonnier de guerre mort le 7 mars 1941 à Hohenstein en Allemagne.
   - 
MLLE CAVAILLON Pauline, professeure à l'École primaire supérieure de filles de Reims, arrêtée comme juive et déportée à Auschwitz par le convoi 68 du 10 février 1944, morte en déportation.
   - 
CHABAUD Alfred, professeur à l'École nationale des arts et métiers de Châlons-sur-Marne, déporté le 27 janvier 1944 à Buchenwald puis à Dora, mort en déportation en 1944.
   - 
CHAROLET [Charles Paul ?], né en 1860 à Pleurs, mort le 15 juin 1940 à Saint-Maure (Aube), victime civile.
   - C
HAUMONT Albert, « Mort pour la France » le 10 mai 1940 au-dessus du Luxembourg au cours d'une mission de reconnaissance aérienne.
   - 
DECOURDEMANCHE Daniel [alias Jacques DECOUR], professeur agrégé d'allemand au lycée de garçons de Reims de 1932 à 1936, fusillé au Mont Valérien le 30 mai 1942.
   - 
DORÉ Jacques, professeur d'anglais au collège de Vitry-le-François, fusillé le 29 avril 1942 à Châlons-su-Marne.
   - 
DUTERQUE Robert, instituteur à l'École du boulevard des Belges à Reims, déporté à Neunegamme, Kommando de Bremen-Farge, mort à Ravensbrück le 14 avril 1945.
   - 
MME FASQUELLE Marguerite [née DE LATTRE], décédée le 7 juin 1940 à Bacqueville-en-Caux en Seine-Inférieure (Seine-Maritime), victime civile.
   - 
MLLE FAUVET Andrée ?
   - 
FÉRAT Arthur, enseignant domicilié à Aÿ, tué le 28 août 1944 par des soldats allemands lors de la libération de la ville, victime civile.
   - 
FOSSE Frank, né en 1914 en Isère, « Mort pour la France » le 17 mai 1940 dans l'Aisne.
   - 
GARITAN Roger, instituteur à Villers-Allerand, résistant, déporté le 21 mai 1944 à Neuengamme, Kommando de Fallersleben-Laagberg, mort en déportation le 15 avril 1945.
   - 
GUILLAUME Georges, directeur d'école à Saint-Memmie, résistant, tué le 3 juin 1944 au cours d'un bombardement allié à Massy-Palaiseau en Seine-et-Oise (Essonne).
   -
MME GUILLAUME-BROUET, épouse de Georges Guillaume, résistante, tué avec lui le 3 juin 1944 à Massy-Palaiseau.
   - 
HUE Jean, instituteur à Corroy, résistant, déporté le 15 juillet 1944 à Neuengamme, Kommando de Bremen-Osterort, mort en déportation le 2 avril 1945.
   - 
JACQUET René, « Mort pourt la France », décédé le 11 mai 1940 en Belgique.
   - 
JEANNON Pierre, « Mort pour la France », décédé le 13 juin 1940 à Perthuis (Marne).
   - 
JOUSSIER Maurice, instituteur à Lignon, déporté politique à Sachsenhausen, mort en déportation le 14 février 1945 à Oranienburg.
   - 
LABARRE Pierre, instituteur à Vinay, résistant, déporté le 25 avril 1944 à Natzweiler-Struthof, puis à Dachau et Mauthausen, Kommando de Melk, mort en déportation le 16 novembre 1944.
   - 
LALIRE Gervais, prisonnier de guerre, « Mort pour la France », décédé le 4 février 1945 en Allemagne, victime d'un bombardement.
   - 
LAVANDIER Pierre, « Mort pour la France », décédé le 4 juin 1940 de maladie au Mans (Sarthe).
   - 
MME LOMBARD Amélie ?
   - 
LUDET Yves, « Mort pour la France », tué au combat le 4 juin 1940 à Bray-Dunes (Nord).
   - 
MAGONNET Jean ?
   - 
MAREAING Marcel ?
   - 
MME MASSET-WEISS ?
   - 
MOZKOWSKI [MOSZKOWSKI] Sigismond, professeur de mathématiques au collège de Châlons-sur-Marne, résistant, déporté par le convoi 68 du 10 février 1944 à Auschwitz, mort en déportation le 15 février 1944.
   - 
MLLE PIERRE Thérèse, ancienne élève de l'École normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne, professeure déplacée d'office en Bretagne, résistante, morte sous la torture le 26 octobre 1943 à Rennes (Ille-et-Vilaine). 
   - 
PLOIX Julien, « Mort pour la France », le 10 octobre 1939 à Saint-Dizier (Haute-Marne).
   - 
POCOUAT [POCQUAT] Robert, « Mort pour la France », décédé accidentellement le 6 novembre 1943 en Allemagne.
   - 
POIRET Marcel, « Mort pour la France » le 10 juin 1940 en Moselle.
   - 
SIROT Raymond, instituteur à Gueux, résistant, déporté le 22 janvier 1944 à Buchenwald, mort en déportation le 18 mars 1944.
   - 
TAILLAND Robert ?
   - 
THOMAS André, instituteur à Saint-Gilles, résistant, mort en action le 28 août 1944 à Champlat (Marne).
   - 
MME TRANCHARD Yvonne ?
   - 
TUILLOT Armande ?
   - 
VIEILLE Paul, professeur agrégé de philosophie au lycée de garçons de Reims de 1928 à 1937, résistant, déporté le 15 août 1944 à Buchenwald, mort en déportation le 7 décembre 1944.
   - 
WATTIER [WATIER] André, professeur au Collàge moderne et technique et à l'École de commerce de Reims, résistant, exécuté par des miliciens fin août 1944.
    

   Dans le hall de l'École Jean Macé 11, boulevard des Belges, une plaque érigée à l'initiative de Libération-Nord « À ses membres instituteurs de cette école morts pour la libération de la France » honore la mémoire de Jean ALLIN « Lt [Lieutenant] FFI tué en mission à La Celle-sous-Chantemerle », instituteur de l’école Jean Macé nommé en 1941 à La Celle-sous-Chantemerle, dont le nom est orthographié ALLAIN par erreur, tué au combat en août 1944, et de Robert DUTERQUE, mort en déportation, déclaré par erreur « mort au camp de Neuengamme », décédé en réalité à Ravensbrück.   
    Un
buste en pierre représentant une allégorie de la IVe République avec un écusson à Croix de Lorraine de Libération-Nord, rappelle que ces résistants appartenaient à ce mouvement de Résistance.
   Un autre
buste-challenge de l’Union française des œuvres laïques d’éducation physique (UFOLEP) porte le nom de Jean-Marie DOCQ, secrétaire général de la Bourse du travail de Reims, déporté à Neuengamme, décédé le 10 avril 1945 au camp-mouroir de Sandbostel.


Dans la cour intérieure du Lycée Roosevelt 10, rue du président Franklin Roosevelt, une plaque porte le nom d'André WATIER professeur dans l'ancien collège moderne et technique, et responsable en 1944 du groupe de résistance de Ludes, « Mort pour la France », exécuté par des miliciens fin août 1944 près de la Ferme de l'Espérance, aux confins des communes de Verzenay et de Beaumont-sur-Vesle.
  


   Les noms de
Pierre BARBIER, Robert DUTERQUE et Jean HUE sont inscrits sur la plaque commémorative apposée d à l'intérieur de la Maison régionale des syndicats 15, boulevard de la Paix.

 

    À Reims, plusieurs inscriptions rendent hommage à Pauline CAVAILLON et à sa sœur aînée Debora BUZEIANO :
- sur la plaque apposée en 1947 par la Ville de Reims à leur domicile 27, rue de l'Arquebuse,
- sur la stèle accolée à la façade de la synagogue 49, rue Clovis,
- sur la dalle des « Victimes civiles de la répression nazie » du monument aux martyrs de la Résistance et de la Déportation sur les Promenades Jean-Louis Schneiter.

   Le nom de Pauline CAVAILLON est inscrit sur la plaque dédiée aux « Maîtres de l'école laïque victimes de la barbarie nazie » dans le Square des victimes de la Gestapo 18, rue Jeanne d'Arc.
   Née le 16 février 1884 à Nîmes (Gard), elle était en 1939 professeur d'allemand à l'École primaire supérieure de filles de Reims installée dans les locaux de l'actuel lycée Libergier.
   Elle a été exclue de l'enseignement par la loi du 3 octobre 1940 portant statut des Juifs.
   Le 27 janvier 1944, elle a été arrêtée à son domicile avec sa sœur Debora.Toutes deux ont été déportées à Auschwitz par le convoi 68 du 10 février 1944, et gazées à l'arrivée.
   Leurs noms sont gravés sur le Mur des noms du Mémorial de la Shoah 17, rue Geoffroy l'Asnier à Paris.

 

À Châlons-en-Champagne

   À Châlons-en-Champagne une stèle « 1939-1945 » a été érigée après la guerre dans l'École normale d'instituteurs qui a été ultérieurement transférée 1, boulevard Victor-Hugo, dans la cour d'honneur de l'ancienne École normale d'institutrices devenue successivement Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) en 1990, puis École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) en 2013 et depuis 2019, Institut national supérieur du professorat et de l'éducation (INSPÉ). Dans un couloir de cet établissement, une plaque rappelle le souvenir de deux anciennes élèves de l'École normale d'institutrices de Châlons, Jeanne BARILLON et Thérèse PIERRE.

   - ALLIN Albert [Jean], instituteur à l’École Jean Macé à Reims, FFI appartenant au groupe de Sézanne, mort des suites de ses blessures le 30 août 1944.
   - 
BAICRY Christian, « Mort pour la France », décédé accidentellement le 17 avril 1944 à Thionville (Moselle).
   - JACQUET René, « Mort pourt la France », décédé le 11 mai 1940 en Belgique.
   - BARBIER Pierre, instituteur révoqué par le gouvernement de Vichy, résistant, déporté le 15 juillet 1944 à Neuengamme, Kommando de Husum-Schwesingen, mort en déportation le 15 février 1945.
   - BONNET Maurice ?
   - CAURIER René, prisonnier de guerre mort le 7 mars 1941 à Hohenstein en Allemagne.
   - CHAUMONT Albert, « Mort pour la France » le 10 mai 1940 au-dessus du Luxembourg au cours d'une mission de reconnaissance aérienne.
   - DUTERQUE Robert, instituteur à l'École du boulevard des Belges à Reims, déporté à Neunegamme, Kommando de Bremen-Farge, mort à Ravensbrück le 14 avril 1945.
   - FÉRAT Arthur, enseignant domicilié à Aÿ, tué le 28 août 1944 par des soldats allemands lors de la libération de la ville, victime civile.
   - GARITAN Roger, instituteur à Villers-Allerand, résistant, déporté le 21 mai 1944 à Neuengamme, Kommando de Fallersleben-Laagberg, mort en déportation le 15 aveil 1945.
   - GUILLAUME Georges, directeur d'école à Saint-Memmie, résistant, tué le 3 juin 1944 au cours d'un bombardement allié à Massy-Palaiseau en Seine-et-Oise (Essonne).
   - HUE Jean, instituteur à Corroy, résistant, déporté le 15 juillet 1944 à Neuengamme, Kommando de Bremen-Osterort, mort en déportation le 2 avril 1945.
   - JEANNON Pierre, « Mort pour la France », décédé le 13 juin 1940 à Perthuis (Marne).
   - JOUSSIER Maurice, instituteur à Lignon, déporté-politique à Sachsenhausen, mort en déportation le 14 février 1945 à Oranienburg.
   - LABARRE Pierre, instituteur à Vinay, résistant, déporté le 25 avril 1944 à Natzweiler-Struthof, puis à Dachau et Mauthausen, Kommando de Melk, mort en déportation le 16 novembre 1944.
   - LALIRE Gervais, prisonnier de guerre, « Mort pour la France », décédé le 4 février 1945 en Allemagne, victime d'un bombardement.
   - LAVANDIER Pierre, « Mort pour la France », décédé le 4 juin 1940 de maladie au Mans (Sarthe).
   - LUDET Yves, « Mort pour la France », tué au combat le 4 juin 1940 à Bray-Dunes (Nord).
   - MAGONNET Jean
   - PLOIX Julien, « Mort pour la France », le 10 octobre 1939 à Saint-Dizier (Haute-Marne).
   - POIRET Marcel, « Mort pour la France » le 10 juin 1940 en Moselle.
   - SIROT Raymond, instituteur à Gueux, résistant, déporté le 22 janvier 1944 à Buchenwald, mort en déportation le 18 mars 1944.
   - WATIER André, professeur au Collège moderne et technique et à l'École de commerce de Reims, résistant, exécuté par des miliciens fin août 1944.
   - WILLAUME Abel, mort de maladie contractée en service le 23 mars 1940 à Vitry-le-François.

 

   À Châlons-en-Champagne où une rue porte le nom d'Irénée DLÉVAQUE, une plaque honore la mémoire de Sigismond MOSZKOWSKI dans la salle des professeurs du Lycée Pierre Bayen 22, rue du Lycée. et le nom d’Alfred CHABAUD a été donné au Grand amphithéâtre de l’École nationale supérieure d’arts et métiers (ENSAM) rue Saint-Dominique.


    

 

À L'Épine

   À L'Épine 33, avenue du Luxembourg, dans l'école dont elle était la directrice, une plaque rend hommage à Jeanne BARILLON. Son nom a été donné à une place d'un nouveau lotissement implanté à l'extrémité de l'avenue du Luxembourg.

 

À Lignon

   À Lignon 18, rue Haut-Montier, une plaque apposée sur la façade de la mairie honore les instituteurs de ce village du Sud-Est marnais « Morts pour la France », dont Maurice JOUSSIER disparu en déportation.

 

Les établissements scolaires qui portent le nom de résistants marnais

    Dans la Marne, dans la Meuse et en Ille-et-Vilaine, des établissements scolaires portent le nom d'enseignants marnais engagés dans la Résistance : École Roger Garitan à Villers-Allerand, Collège Yvette Lundy à Aÿ-Champagne, Collège Raymond Sirot à Gueux. Le nom de Thèrèse PIERRE a été donné à une école de Bar-le-Duc dans la Meuse et à un collège de Fougères en Ille-et-Vilaine.

 

   Trois établissements scolaires portent le nom de résistants marnais qui n'étaient pas des enseignants : l'École Gérard Moulin à Châlons-en-Champagne, le Collège Gisèle Probst à Vitry-le-François dans la Marne et le Groupe scolaire Camille de Mareüil à Négreville dans la Manche..

Gérard MOULIN (1908-1945)

   

   Gérard Moulin est né le 7 juin 1908 à Chisseaux (Indre-et-Loire). Il était le fils d’Armand Moulin, cafetier, et de Louise Rose Ruby, son épouse, sans profession. Il exerçait la profession de plombier au moment de son mariage le 5 mai 1930 à Tours avec Suzanne Catherine Henry qui était originaire de la Marne.
Gérard Moulin a été engagé à la SNCF à Châlons-sur-Marne (Châlons-en-Champagne) et le couple s’est installé à Saint-Memmie.
En juin 1940 Gérard Moulin a été mis à la disposition d’un officier du génie chargé de la destruction des ponts de chemin de fer pour retarder l’avance de l’armée allemande.
En 1943, il a rejoint le réseau de renseignements Jade-Fitzroy et le groupe FTPF (Francs-tireurs et partisans français) de Châlons-sur-Marne. Il a participé à des actions de renseignement et de sabotage des transports militaires allemands.
   Le 2 août 1944, Gérard Moulin a été arrêté à Châlons-sur-Marne. Il a été déporté au camp de Natzweiler-Struthof le 19 août 1944, avec Paul Mouton, Charles Muard et Raphaël Parras, qui avaient été arrêtés eux aussi le 2 août 1944 à Châlons-sur-Marne. À Natzweiler Gérard Moulin a reçu le matricule 22 824. Il a été transféré dans les premiers jours de septembre à Dachau et il a été affecté au Kommando de Dautmergen. Il y est décédé le 10 décembre 1944 selon le Livre-Mémorial des déportés de France. Son dossier au Bureau Résistance de Vincennes le déclare décédé le 28 février 1945 à Vaihingen, date et lieu retenus par le Jo du 14 décembre 1997.
   Gérard Moulin fait partie des rares déportés dont le corps a pu être rapatrié. Il a été inhumé dans la nécropole nationale de Natzweiler-Struthof, carré C, rang 3, tombe 43.
   Paul Mouton est décédé le 2 mars 1945 à Dachau. Charles Muard et Raphaël Parras sont rentrés de déportation.

   Gérard Moulin a été reconnu « Mort pour la France ». Il a été homologué FFC (Forces françaises combattantes) au titre du réseau Jade-Fitzroy et DIR (Déporté-Interné-Résistant). Il a reçu à titre posthume le titre de  de Combattant volontaire de la Résistance avec la  mention DIR, et la Médaille de la Résistance par décret du 6 août 1955 publié au JO du 17 août 1955.
   À Châlons-en-Champagne où une rue porte son nom, Gérard Moulin figure sur les plaques commémoratives de la gare SNCF et de la prison, ainsi que sur le monument aux morts. Une école maternelle de la ville porte son nom.
   À Saint-Memmie, son nom est également inscrit sur la liste 1939-1945 du monument aux morts, et sur une plaque commémorative en mairie.

 

Gisèle PROBST, née GOUJARD (1922-2019Z

   Gisèle Jeanne Alzire Goujard est née le 11 septembre 1922 à Jessins dans l'Aube. Ses parents sont venus s'installer en 1928 à Vitry-le-François dans la Marne où son père, Maurice Goujard, exerçait la profession de boucher-charcutier. Au cours de l'exode de mai 1940, elle a quitté Vitry-le-François avec ses parents et Rose Probst, la maman de son fiancé Jean Probst, pour aller se réfugier à Clermont-Ferrand dans le Puy-de-Dôme. Au lendemain de la défaite, ne pouvant rentrer à Vitry-le-François, ville dévastée lors de l’offensive allemande de mai 1940 par des obus explosifs et incendiaires, où sa boucherie-charcuterie avait été entièrement détruite, Maurice Goujard a acheté une épicerie-charcuterie à Clermont-Ferrand où la famille s'est installée. Le 15 décembre 1941, Gisèle s'est mariée avec Jean Probst qui venait d'être démobilisé et de reprendre son métier de mécanicien-auto dans un garage de Clermont-Ferrand.
  Contacté en janvier 1943 par un ancien gendarme de Vitry-le-François, Maurice Goujard s'est mis avec toute la famille au service du réseau Mithridate, un réseau de renseignement militaire rattaché au Bureau central de renseignements et d’action (BCRA) de la France libre. Le domicile de la famille Goujard à Clermont-Ferrand servait de boîte aux lettres et de refuge pour les clandestins. Maurice Goujard mettait ses véhicules au service du réseau Mithridate, dans des missions de transport des agents du réseau, et de reconnaissance de terrains d’atterrissage pour avions Lysander. Ces petits avions étaient utilisés par la Royal Air Force (RAF) pour infiltrer ou exfiltrer des agents du réseau envoyés en territoire occupé ou rappelés à Londres. Jean participait à la préparation des exfiltrations. Gisèle, pseudo « Gigi » et sa belle mère Rose servaient comme agents de liaison.
   Le 17 octobre 1943, à la suite d'une dénonciation, Maurice Goujard, Gisèle et Rose Probst ont été arrêtés et incarcérés à la prison de Clermont-Ferrand. Jean Probst qui était en mission a échappé à l'arrestation.
   Maurice Goujard a été interné dans le camp A de Royallieu-Compiègne, et il a été déporté le 17 janvier 1944 vers le camp de concentration de Buchenwald. Il a été transféré à la mi-février au camp de Flossenbürg, puis dans le « camp des détenus » de Bergen-Belsen où il a disparu.
   Gisèle et Rose, transférées elles aussi au camp de Royallieu-Compiègne, ont été déportées le 31 janvier 1944 au camp de Ravensbrück où elles ont été séparées. Rose Probst est morte d'épuisement et de dysentrie le 28 février 1944. Gisèle a été transférée à Leipzig et affectée au Kommando de Schlieben où elle a été libérée par l'Armée rouge le 21 avril 1945.
Elle a été rapatriée en France le 18 mai 1945.
   Elle a été homologuée FFC (Forces françaises combattantes) au titre du réseau Mithridate, et elle a reçu le titre de Combattant volontaire de la Résistance avec la mention Déporté-interné-résistant, ainsi que la Médaille de la Résistance.
   Après la guerre, elle a été très active au sein du comité d'érection du Mémorial de la Déportation de Vitry-le François, inauguré en 1974 en présence de sa camarade de déportation Geneviève Anthonioz-de-Gaulle, et elle n'a cessé de témoigner auprès des jeunes en particulier dans le cadre de la préparation au Concours National de la Résistance et de la Déportation.

   Elle est décédée le 25 avril 2019 et a été inhumée dans le cimetère de Saint-Amand-sur Fion.
   En 2021, le Collège du Vieux Port de Vitry-le-François a été rebaptisé Collège Gisèle Probst.

   En 2023, un petit ouvrage qui retrace l'histoire de la famille Goujard-Probst a été publié sous le titre Une famille de résistants vitryats au service du réseau Mithridate.


La famille Goujard-Probst
Jean Probst


Camille BOULA DE MAREÜIL (1914-1945)

   Camille Gontran Marie Gaston Boula de Mareüil est né le 11 mai 1914 à Paris (XVIe arr.). Il était le fils de Gaston Antoine Joseph Boula de Mareüil, propriétaire, et d’Alix de Luppé, sans profession. Diplômé d'HEC, il avait intégré avant-guerre la maison de champagne Moët-et-Chandon à Épernay. Mobilisé en 1939, il a participé à la bataille des Flandres en mai-juin 1940 et a reçu la Croix de guerre avec citation à l’ordre du régiment pour son courage en particulier à Dunkerque où, après l’embarquement de son unité, il est resté avec l’arrière-garde pour protéger l’évacuation des dernières troupes alliées qui ont pu embarquer pour l’Angleterre. Démobilisé, il est revenu dans la Marne.
   En janvier 1941, Camille Boula de Mareüil a été arrêté après la découverte chez Ernest Muller et Émile Renaux d’une machine à polycopier et de tracts communistes, puis il a été  remis en liberté.
   Contacté par Robert de Vogüé, il s’est consacré à la mise en place du Comité Interprofessionnel des vins de Champagne (CIVC) créé en avril 1941.
   Le 17 mai 1942, il s’est marié à Paris (XVIe arr.) avec Louise Gabrielle Marie Potier de la Morandière et le couple s’est installé à Pierry.
    En 1943, il a réintégré la maison Moët-et-Chandon comme directeur commercial et fondé de pouvoir. Il a mené ses activités professionnelles en parallèle avec son activité résistante au sein du groupe local de Ceux de la Libération (CDLL) animé par Robert de Vogüé. Plusieurs membres de ce groupe, Henri Fignerol, Maurice Germain et Alfred Untereiner (frère Birin), étaient aussi membres du réseau Éleuthère auquel Camille de Mareüil fournissait des renseignements.
   À partir de fin novembre 1943, le groupe CDLL d’Épernay a été décimé par une série d’arrestations. Camille Boula de Mareüil a été arrêté le 26 décembre 1943, un mois seulement après la naissance de son fils Arnaud. Incarcéré à Châlons-sur-Marne, il a subi plusieurs interrogatoires au siège de la Gestapo, puis il a été  transféré au camp de Compiègne le 1er février 1944. Il a été déporté le 27 avril 1944 à Auschwitz où le convoi est parvenu après un voyage très éprouvant de trois jours. À l’arrivée, les déportés de ce convoi ont été tatoués et Camille Boula de Mareüil a reçu le matricule 185 140. Le 14 mai 1944 il a été transféré avec ses camarades à Buchenwald, puis le 25 à Flossenbürg où il a été affecté à l’usine d’aviation Messerschmitt du Kommando de Flöha. Il y a travaillé dans un atelier glacial sur une perforeuse dont les projections de métal lui déchiraient les mains. Des déportés survivants ont témoigné de son courage, de son abnégation et de l’aide qu’il a apportée aux camarades malades en prélevant pour eux sur sa maigre ration.
   Le camp a été  évacué le 14 avril 1945. Les déportés ont subi alors une terrible marche de la mort qui a décimé plus de la moitié d’entre eux. Camille de Mareüil, épuisé, est mort le 26 avril 1945 dans la colonne de déportés. Son corps et celui de Marcel Jullemier, qui avait connu le même parcours de déportation que Camille Boula de Mareüil, ont été transportés sur une charrette jusqu’à l’étape suivante dans le village de Gross Weschenditz, où un déporté alsacien, Christian Leninger, les a fait inhumer dans le cimetière. Le JO du 16 juillet 1994 retient comme lieu du décès Gross Weschenditz, actuellement Verušice au nord de la République tchèque.
   Le corps de Camille Boula de Mareüil a été rapatrié en France et réinhumé le 24 novembre 1954 à Négreville dans la Manche où sa famille possédait le château de Pont-Rilly et où il avait passé une partie de sa jeunesse avec ses parents et ses huit frères et sœurs. Son nom est inscrit sur le monument aux morts de Négreville et a été donné le 22 mai 1999 au groupe scolaire de la commune.
   Dans la Marne, à Épernay, il figure sur la liste des déportés du monument aux martyrs de la Résistance et sur une plaque commémorative dans les locaux de la maison de champagne Moët-et-Chandon. Son nom est également inscrit sur le monument aux morts de Pierry.
   Camille Boula de Mareüil a été homologué DIR (déporté-interné-résistant) et FFI. Il a reçu la médaille de la Résistance à titre posthume.